Nous sommes le soir du Réveillon. Camille (Noémie Lvovsky) est une actrice ratée qui enchaîne les rôles de figuration pour vivre et habite un misérable appartement qu’elle partage avec son ex-mari, Éric (Samir Guesmi), photographe. Après une figuration, elle rentre chez elle, épuisée, pour y trouver son mari qui fait ses cartons et a décidé de mettre l’appartement en vente. En se rendant à une soirée chez ses amies du lycée, elle passe chez un vieil horloger (Jean-Pierre Léaud) qui lui règle la montre que ses parents lui ont offerte pour son 16ème anniversaire, en la décalant d’une seconde. Elle lui demande aussi de lui couper sa bague de fiançailles qu’elle ne peut plus enlever.
La soirée costumée est très arrosée et Camille, qui a une addiction à l’alcool, tombe dans un coma éthylique au moment exact du 12e coup de minuit. Elle se retrouve à l’hôpital, transportée à l’âge de ses 16 ans, et revit sa vie. Bien que, pour le spectateur et pour elle-même, elle soit toujours dans le corps et avec les souvenirs d’une cinquantenaire, les autres la voient comme une adolescente.
Ses parents qui, dans la réalité, sont décédés, lui apparaissent comme ils étaient alors qu’elle avait 16 ans et elle se retrouve dans la maison de son enfance, et elle doit retourner au lycée (d’où le titre, Camille redouble), retrouver ses copines, ses profs et … Eric. Sachant comment sa vie s’est terminée, elle fait tout pour éviter de tomber amoureuse et changer le cours de sa vie mais, bien entendu, elle n’y parvient pas.
Voici ce que dit de ce film Louis Guichard, le critique de Telerama : « C'est Noémie Lvovsky, la réalisatrice, qui joue ce personnage, aussi bien au présent qu'en visite dans le passé, où les autres la voient comme une toute jeune fille. Pas d'effets spéciaux à la Benjamin Button : la différence physique se limite au maquillage et à la longueur des cheveux. Ce corps bien peu adolescent est évidemment source de burlesque — a fortiori revêtu de la panoplie girlie des années 1980, genre Cindy Lauper. Mais il rappelle surtout le degré supérieur de conscience de Camille : elle sait tout des vingt-cinq années suivantes, qui va se marier, tomber malade, mourir...
Certains auront reconnu, dans ses moindres détails, le principe de Peggy Sue s'est mariée, de Francis Ford Coppola : Camille redouble en est une sorte de remake, avec ceci de piquant que l'époque de la maturité désenchantée de Peggy (1987) correspond au paradis de jouvence de Camille. En vérité, les deux films sont animés par des forces très différentes. Coppola démystifiait le temps d'avant. Lvovsky est plus émouvante, plus romantique : elle assume jusqu'au bout l'idéalisation du passé. Il y a une magie proustienne dans les retrouvailles avec les parents, les copines, la chambre d'ado tapissée de photos d'acteurs, cette impression de Camille de rentrer à la maison, même quand elle prend place dans une salle de classe.
Se recueillir ou agir, notre héroïne hésite. Face au miracle de la présence physique de sa mère (Yolande Moreau), dont elle sait la mort imminente, elle s'empresse d'enregistrer cette voix si douce, pour en garder, cette fois, la trace. En amour, la tentation d'interférer dans le cours des choses est la plus forte, à la lumière d'un avenir déjà connu. Quand Camille croise, au lycée, Eric, son futur mari et futur-ex, elle cherche avec véhémence à résister au coup de foudre, à faire payer à l'innocent (Samir Guesmi) sa trahison à venir. Et elle met un point d'honneur à s'amuser avec d'autres. Une scène hilarante la jette dans un lit avec un condisciple d'abord émoustillé par ses avances sexuelles en plein cours de sport, puis complètement paniqué par son expertise pratique...
Est-ce que Camille saura tout recommencer sur de nouvelles bases ? Est-ce qu'on peut changer le passé ? On s'en fiche. Ou plutôt : chacun connaît déjà la réponse. Le charme irrésistible du film est ailleurs. Tout spectateur retrouvera instantanément l'essence de ses années lycée, mieux encore qu'avec une reconstitution directe, comme le fut un précédent film, déjà formidable, de Lvovsky, La vie ne me fait pas peur. Dans Camille redouble, cette liberté, cet élan juvénile qui projettent l'héroïne vers les autres (parents, amies, profs, garçons) sont délestés de toutes les contraintes propres à l'instant présent. Si, pour le commun des mortels, l'adolescence est sur le moment un brouillon indéchiffrable, le film nous offre un luxe : la version « au propre », celle où l'on y voit enfin clair, où l'essentiel saute aux yeux. La seconde fois est bien plus belle que la première. Camille redouble, et c'est ce qu'on souhaite à tout le monde. »
Mon opinion sur ce film
Si j'ai bien compris le propos de la réalisatrice, je suis loin d'avoir été enthousiasmé par ce film et, à part quelques moments, je n'y ai pas trouvé le "charme irrésistible" que décrit Louis Gichard. Certes, certaines scènes sont hilarantes (en particulier lorsque Camille, vêtue comme une gamine de 16 ans alors qu'elle a un corps assez abîmé de cinquantenaire, s'apprête à aller au lycée ou lors de certaines répliques quand, oubliant qu'elle est censée n'avoir que 16 ans, qu'elle a été mariée 25 ans, etc. On a beau savoir que c'est une fable, on n'y croit pas. Quant aux anachronismes, même s'ils ont été voulus par la réalisatrice pour nous rappeler qu'on était dans le rêve ou la fable, leur accumulation a fini par m'agacer.
Je n'ai pas honte de le dire : si je ne me suis pas ennuyé, je n'ai pas aimé surtout en comparaison du brillant film de François Ozon Dans la maison, que j'avais vu samedi.