Une grande pièce éclairée par des lumières vacillantes, un public en furie qui observe un combat vif dans lequel aucun doute n’est permis et où la pitié est indiquée par un arbitre. Un ring. Dessus, deux hommes qui s’affrontent, propageant leur colère dans les poings. Le round fini, ils se séparent pour mieux s’observer en chiens de faïence à travers les creux laissés entre les épaules de leurs coaches respectifs. Antoine Fuqua filme la passion rageuse présente au sein du sport, cette étincelle qui se dégage lorsque celui-ci se déroule… Et les conséquences, d’abord invisibles, puis qui percent l’écran comme le jour qui franchit les ouvertures laissées par un volet de fenêtre. Un mince filet de lumière qu’on pourrait sans aucun mal différencier à l’espoir d’un père pour retrouver sa fille. Le temps pour que la caméra de Fuqua nous emmène loin du stress et des paillettes liés à un milieu dangereux où l’on peut tout perdre en quelques secondes. Mais sinon, Fuqua poursuit les filets du ring pour filmer Hope. Un nom bien choisi pour un casting détonant, Gyllenhaal et Whitaker en premier plan, accompagné, pour le départ, d’une McAdams radieuse en cette « femme de ». Le début du film est réussi. Une tension palpable prend à la gorge, saisissante, pas forcément de surprises mais d’une sorte d’aura puissant contenu seulement dans la mise en scène et dans les interprétations. Ce qui fait prêcher un scénario qui tombera trop facilement dans le mielleux, avec une Oona Laurence mignonne, certes, mais qui énerve à cause d’un jeu qui en fait trop. Bien-sûr on ne peut pas empêcher les caricatures de bas-étage liées au milieu de la boxe, mais celles-ci obscurcissent moins l’écran que pour un énième Rocky, par exemple, le scénariste Kurt Sutter sachant les rendre acceptables. Et de toute manière, dans un tel film, il n’y a pas d’autre choix au final, car les règles sont tellement collées, imposées depuis des années et des années, que des nouveautés et donc libertés scénaristiques auraient sûrement du mal à être acceptées. Et c’est la même chose pour la mise en scène, qui se trouve être très technique dans ce « Southpaw ». Faut-il alors aller croire que pour réaliser un film sur la boxe, ses gloires et ses travers, il faille être bien vu, et surtout placé dans une certaine famille? Non. Enfin, en tout cas, lorsque le projet ne dépasse pas le stade de l’indépendant et de l’expérimentalisme. C’est une condition qu’il faut savoir respecter, avec le soutien d’acteurs bankables et d’une équipe technique possédant une certaine renommée dans leurs domaines, pour espérer avoir le soutien de grands studios et donc d’un fond de financement. C’est donc normal si on ne peut voir que très peu de diversité, déjà dans ce domaine, puis dans d’autres. À cause des studios, le cinéma reste trop paisible, pas assez osé, triste à voir car cela apporte des projets mal finis qui provenaient pourtant d’une bonne idée, scénaristique ou de mise en scène. Et c’est le problème de ce film, le début est efficace avec des idées techniques intuitives et malignes, puis plus le temps passe et plus ces aspects ont du mal à revoir le jour. Arrive ce moment où on aimerait voir autre chose qu’un Jake Gyllenhaal, si il est comme toujours très bon, torturé et affaibli par les impétueuses souffrances vécues précédemment. On le voit ainsi s’écrouler d’échelon à échelon sans grande joie ni attention, pour terminer avec… Un match-retour avec son pire ennemi? Réellement? La boîte à idées était réellement aussi vide à ce moment dans la tête de Kurt Sutter, excellent scénariste de « Punisher » (qui lui manquait de punch dans sa réalisation) et de la série « Sons of Anarchy », excellente la plupart de son temps? Quelle déception, on passe d’une caméra qui file à travers la sueur, les larmes et le sang déversés par les boxeurs à du champ contre-champ poussif et surtout à une discussion poussive et larmoyante entre un père absent et une actrice qui joue faux. Trou noir artistique pour oeuvre de niveau moyen, ce « Southpaw » se savoure mais ce jusqu’à un certain point.