Tomboy, un film qui interroge. D'abord en passant devant son affiche, simple pourtant, où l'on se demande quelle est cette personne qui y figure. Un garçon, une fille ? Quel est le sens de son regard ? À quoi elle pense ? En visionnant l'oeuvre de Céline Sciamma, ce sentiment profond et ambigüe est toujours présent, et l'on comprend que cette image se trouve à l'écran lorsque cet enfant se fait dessiner par sa petite sœur. Pour en revenir à l'histoire, elle aussi paraît simple. Laure, dix ans, déménage avec ses parents et sa sœur Jeanne dans un nouvel appartement. Nous sommes à quelques jours de la rentrée scolaire, et la jeune fille décide de sortir de son immeuble afin de se faire de nouveaux copains. Au fil des jours, elle arrive à intégrer cette bande et à devenir proche de l'un de ses membres : Lisa. Le seul hic, c'est qu'elle se fait passer pour un garçon prénommé Mickaël depuis le début. Suivre une partie de l'enfance d'un garçon manqué en abordant le thème de l'homosexualité est un pari risqué au cinéma, mais malgré tout, la réalisatrice s'en sort de manière brillante. La façon de capter ces moments de jeunesse en filmant leurs loisirs, ces « action/vérité » ou ces baignades dans un lac, est à la fois simple et d'une intimité à toute épreuve. On vit ces instants magiques car ils font aussi partis de nous, de nos souvenirs impérissables qu'on gardera en mémoire, car ce sont eux qui nous construisent et nous font grandir. Quant à Laure/Mickaël, elle nous laisse sans voix tant son interprétation est spontanée, subtile et innocente, comme nous pouvons l'être lorsqu'on a dix ans. Sciamma a le soucis de mettre son corps en évidence, en soulignant ses cheveux, ses bras, ses jambes. De même, on observe souvent Laure se regarder dans le miroir en étudiant son anatomie, comprenant qu'elle est obsédée par cela et voudrait être différente. Elle est en pleine croissance physique, où la quête identitaire prend une place toute aussi importante. La puissance de ce film, c'est que de nombreuses questions se posent mais que peu de réponses apparaissent, tant pour elle que pour nous. Car nous ne savons pas forcément d'où naissent les sentiments, et c'est ce qui font leurs mystères.