Tyrannosaur, premier long-métrage de Paddy Considine (version longue de son court, Dog Altogether) de Paddy Considine est une oeuvre d’une noirceur abyssale dont les affres psychologiques des personnages principaux (déjà présents dans le court-métrage) sont les vecteurs d’une résurrection possible.
Dans la pure lignée des films indépendants britanniques à consonance sociale, Paddy Considine signe une œuvre véritablement violente de propos et de faits. Mené par Peter Mullan, égal à lui-même et au sommet de son art, le film ne tranche à aucun moment sur un rythme toujours soutenu et nécessaire. Si les moments les plus éprouvants se font rares, ils sont d’une signification démesurée dans un mépris total de la personne.
Filmé dans un cadre social vidé de vie(s) et de sa lumière, cette ville presque fantomatique fait office de bulle sociale à ces deux êtres à la recherche d’un soutien, d’un regard, sans l’admettre soit par conviction religieuse (le personnage d’Hannah (Olivia Colman) ou fierté humaine mais primaire et « animale » (Joseph (Peter Mullan)).
Si les actes de barbaries, physiques et mentales, peuvent choquer, sans qu’ils soient dénués de crédibilité, c’est pour en démontrer le fonctionnement. Les personnages principaux de manière consciente ou non devront alors trouver une échappée au sens même de leur vie, la prison citadine que représente la ville étant pour eux une représentation carcérale dans laquelle leur corps sont enfermés.
À ce titre l’interprétation d’Olivia Colman, cantonnée jusqu’ici à des comédies, nous éblouie de son interprétation dramatique faisant jeu égal avec l’immense Peter Mullan, charismatique de présence, de corps et de voix.
Aucune gratuité donc dans la démonstration de Cassidine, un simple constat (peut-être poussif) de ce qu’un être peut vivre, poussé dans ces derniers retranchements, acculé à un mur, face à un vide existentiel et de sens.
Dans ces dernières minutes, là où la lumière perçait enfin à travers un ciel constamment gris, le réalisateur offre à ses personnages, cette liberté recherchée qui dans un paradoxe futile s’est inversé entre Joseph et Hannah, et entre liberté psychique et physique.
Tyrannosaur est cet ensemble même, une rencontre entre deux personnages qui ne trouveront leur salut que dans un soutien réciproque, à la croisée des chemins entre vie humaine et animale. La violence dans sa représentation spectaculaire et sa noirceur n’est présente que par la nécessité d’amorcer une détonation intérieure dans la vie des personnages. Captivant, même s’il emploie des chemins connus d’un cinéma social déjà-vu, Tyrannosaur procure un effet magnétique, autant par l’âpreté de sa réalisation (gros plans fixes) que dans l’interprétation de Mullan et Colman qui délivrent au film une vraie charge émotionnelle.
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