Comme vous avez pu le lire dans la précédente partie de cette rétrospective, après "American Pie 3" une série de spin-off a vu le jour, essayant de profiter du succès des premiers opus pour faire des films ridicules, idiots et dont le côté sexy presque vulgaire n’était là que comme argument de vente auprès du public masculin. Ces spin-off n’ont jamais rien compris de ce qui faisait le succès de la saga principale "American Pie". Puis, 9 ans après ce "American Pie 3", l’ensemble des acteurs des premiers long-métrages se réunissent pour un film réunion. C’est le duo Jon Hurwitz et Hayden Schlossberg, à l’origine de la trilogie "Harold et Kumar", qui est chargé d’écrire et réaliser ce quatrième film. Et que ça fait plaisir de voir un film "American Pie" qui revient aux sources de la saga ! Ils ont tous les deux véritablement compris ce qui faisait la force des films "American Pie" de la saga principale et ils le prouvent avec ce film.
De toute évidence, le duo Hurwitz-Schlossberg s’est beaucoup inspiré du tout premier opus de la franchise homonyme, réalisé par le duo de frères Weitz. Car à la manière des deux frangins qui ont, avec "American Pie", dépeint le portrait d’une génération de jeunes adultes des années 90 qui découvrait le sexe, le duo Hurwitz-Schlossberg dépeint le portrait de cette même génération 10 ans plus tard, forcée à faire face aux désillusions du passé. Désormais, chacun est devenu adulte, a eu le temps de se marier, d’avoir des enfants et même de divorcer. Comme le montrera le récit de chacun des personnages, aucun n’a la vie qu’il espérait avoir lorsqu’il avait 20 ans et tous ont rencontré des difficultés en cours de route. Hurwitz et Schlossberg dresse le portrait de ce que sont devenus en 2010 ceux qui étaient adolescents ou jeunes adultes dans les années 90. On ne va pas aller jusqu’à dire que c’est un film sociétal, mais cette simple volonté de vouloir parler de ces personnes qui font face aux déceptions de la vie après tous les espoirs qu’ils y avaient mis lorsqu’ils avaient 20 ans, démontre que les deux réalisateurs ont compris ce qui fait le cœur de la saga. Ils ont compris que les films "American Pie", ceux de la saga principale, sont avant tout sur des personnages et sur des instants de vie, que ce soit pendant la jeunesse ou plus tard.
Afin de peindre ce portrait des trentenaires des années 2010, les deux réalisateurs également scénaristes aborderont plusieurs aspects de la vie à travers chacun des personnages. Le thème principal est surtout les rêves déçus. Ceux que l’on a quand on est jeune, quand on fantasme sur notre vie future, mais qui ne se réalisent jamais et qui finissent par n’être qu’un lointain souvenir. Chacun des protagonistes représentent un point de ce thème (un divorce, la perte d’une amitié, un métier insipide, des erreurs de parcours, etc…).
Pour rendre ce portrait plus frappant, les deux cinéastes opposent ces trentenaires aux adolescents-jeunes adultes des années 2010. Ces nouveaux jeunes renvoient directement aux trentenaires l’image de leur jeunesse à eux et par la même occasion tous les espoirs qu’ils avaient alors. La mise en perspective de ces deux générations passe évidemment par l’humour car les films de la franchise sont avant tout des comédies mais cela ne signifie pas pour autant que ce sont des films vides dont l’unique objectif est de faire rire.
Dans un sens, ce quatrième opus est une façon de représenter le temps qui passe et la manière dont la perception de la vie change avec l’âge. Hurwitz et Schlossberg profite du fait que l’on connaisse ces personnages depuis qu’ils ont 20 ans, qu’on sache qui ils étaient et comment ils étaient, pour nous montrer comment ils ont changé et ainsi rendre compte du changement de perception et d’approche de la vie avec l’âge.
La saga "American Pie" a toujours été à propos de ses personnages et de leur évolution, et pas à propos du sexe comme on pourrait croire. L’image de « teenage movie » racoleurs (appelés « teen sex comedy » aux USA) qui colle à ces films est erronée et injuste. C’est à cause des spin-off qu’on s’est mis à penser ça, car ils utilisaient la nudité comme argument de vente, juste pour faire sexy, alors que les films "American Pie" avaient toujours jusque-là utilisé le sexy dans un but humoristique et les touches coquines étaient à chaque fois très soft et modérées. Alors certes, l’humour de la saga peut être un peu gras parfois. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui poussent les gens à penser que ces films sont complètement idiots alors qu’ils ne se résument pas uniquement à cette forme d’humour. Ces films parlent avant tout d’une génération.
Pour ce qui est de l’humour dans ce quatrième film, même s’il n’y qu’une seule vraie séquence qui portent à vraiment rire, l’ensemble du film est très amusant et on se surprend à avoir le sourire aux lèvres à plusieurs moments. Cette amusement devant le film prend le spectateur surtout s’il a vu les premiers films et qu’il connait les personnages. A la manière de ces personnages qui sont nostalgiques de leurs années lycée et université, nous sommes nostalgiques de ces films. Regarder "American Pie : Reunion", c’est comme retrouver un bande de potes qu’on n’avait pas vus depuis longtemps mais que l’on a jamais oubliés et que l’on adore toujours autant. Les acteurs ne sont plus les jeunes comédiens inexpérimentés du premier long-métrage. Il n’y a aucune fausse note désormais, et certains montrent encore une fois qu’ils sont réellement doués tels que Jason Biggs (Jim), Alyson Hannigan (Michelle), Sean William Scott (Stifler) et Eddie Kaye Thomas (Finch). Il y a plusieurs clins d’œil et références aux trois premiers films de la franchise qui feront sans nul doute plaisir aux fans et à ceux qui ont suivi l’évolution de ces personnages assidûment. Peut-être que ce film ne peut véritablement plaire qu’à ceux qui ont vraiment aimé les premiers opus. En tout cas, quand on aime ces personnages, c’est une immense joie que de les retrouver presque 10 ans après. Et on prévoit déjà un jour se retrouver une nouvelle fois, tous ensemble.