Ce film hyper moraliste qui prétend faire le procès de "la lâcheté ordinaire" est peu convaincant, du moins il ne m'a pas convaincu. D'une part, la réaction des 38 témoins qui, sans exception, ont entendu les cris d'une victime sans intervenir, à l'exception d'un seul, prétendent ne rien avoir entendu, n'est pas très réaliste. D'une part, à notre époque, il est assez rare qu'un événement spectaculaire ou violent se produise en public sans qu'un témoin le filme avec son portable, et on ne voit pas quels risques auraient pris ces gens en appelant à l'aide par la fenêtre, en téléphonant à la police etc. D'autre part, une intervention directe, au milieu de la nuit, n'est pas si évidente, même pour des individus courageux : le temps de comprendre de quoi il s'agit, de s'habiller, de descendre, la victime a largement le temps de se faire tuer - même si le film laisse entendre qu'elle aurait peut-être pu être sauvée.
De plus, les dialogues sont souvent très littéraires et peu adaptés aux situations et aux personnages. Sophie Quinton, face à Yvan Attal, donne parfois l'impression de passer une audition. Ce côté théâtral de certaines scènes ne renforce pas la crédibilité du propos. Enfin, la psychologie des principaux personnages, qui est le ressort essentiel du film, est assez caricaturale : le "héros" (anti-héros en fait) passe de la lâche passivité (assez incompréhensible vu son caractère énergique) à l'hyper culpabilisation.
La chute, s'il est permis de parler de chute, est donc peu vraisemblable.
Dommage, car le film commence bien avec de somptueuses images de navires et du port du Hâvre, et Lucas Belvaux nous a habitués à faire beaucoup mieux, en particulier avec son excellent Rapt.