L'Espagne, dans une période incertaine, proche de la nôtre puisque les jeunes s'échangent des SMS et le métro paraît flambant neuf. Il faudrait d'ailleurs que le cinéma arrête avec cette manie de plus en plus répandue de montrer sur l'écran les échanges de textos de leurs personnages. L'image est floue, granuleuse, comme si le réalisateur avait cherché d'emblé à brouiller la temporalité. Rafa vit dans cette ville espagnole. C'est un gamin sympathique, qui pratique le water-polo, joue à la console de jeu avec ses potes, et découvre ses premières attirances sexuelles pour ... les garçons. Pas tous les garçons en l'occurrence, mais particulièrement Ibrahim, un mineur marocain sans papier, qui vit dans un centre d'hébergement. L'idée générale est bonne. On pense au dernier Téchiné qui montrait avec son incontestable talent le frémissement du désir homosexuel, les doutes, les peurs chez des adolescents. Là où Téchiné brille de sensibilité et de nuance, Mikel Rueda fabrique un cinéma grossier, souvent caricatural, complètement manichéen, qui à force de vouloir tout dire, mélange les genres et le propos. En effet, "Fronteras" ne traite pas seulement d'homosexualité chez les adolescents, mais d'immigration clandestine, de handicap, de trafic de drogue, de sport nautique, de travail social, derrière un fond idéologique bien pensant où naturellement sont visés les populismes de tout genre. La mise en scène, doublée d'un scénario assez confus, pêche par manque de nuance et de prudence, produisant hélas le contraire de ce que le réalisateur a cherché à montrer. Heureusement, le jeu des acteurs, honnête et crédible, sauve parfaitement ce film, à la limite du grotesque.