"Moonrise Kingdom" est un prodigieux chef-d’œuvre de Wes Anderson, l'un de ses longs-métrages les plus aboutis, tant du point de vue scénaristique que esthétique. La beauté des décors, des costumes ou encore des paysages traversés est un régal pour les yeux, et c'est dans cet opus que le réalisateur expose de la manière la plus ostensible son goût pour les plans bien symétriques, une jouissance pour le spectateur. Comme d'habitude, la bande originale est très bien choisie, et la photographie parfaite, chaque scène ressemblant à un tableau animé par des déplacements de caméra unidirectionnels. L'ambiance cartoon est d'ailleurs présente au niveau des protagonistes aussi : si Anderson a souvent imaginé des personnages adultes aux comportements très enfantins, c'est la première fois qu'il traite réellement de l'enfance, et cela est fait avec brio. En effet, si les jeunes présents ici sont tous assez particuliers et irréalistes, leurs aspirations profondes sont bien celles des gens de leur âge. Moonrise Kingdom ressemble ainsi au but ultime vers lequel tout cœur humain cherche à se rapprocher : un paradis perdu, le monde de l'enfance où règnent la paix et l'amour de son prochain. Le jeune couple représente à la perfection cet état : ils sont beaux et paumés, mais déterminés. Ces deux acteurs sont tout à fait bluffants, mais la distribution en général est très talentueuse. Si l'on retrouve les fidèles Bill Murray et Jason Schwartzman, Edward Norton intègre avec élégance la collection de personnages touchants et décalés de Wes Anderson, et trouve l'un des meilleurs rôles de sa carrière, tout droit sorti de la nouvelle "L'Homme hilare" de J.D. Salinger. Pas de doute, il est né pour être chef scout ! De même, Bruce Willis et
Harvey Keitel
sont surprenants et inattendus.
Le film est ainsi un bijou à voir absolument, doux, mélancolique, frais, drôle, poétique et empli d'émotions. À la fin de la projection, un seul mot m'a traversé l'esprit : merci.