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    Françafrique
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    Misoramengasuki
    Misoramengasuki

    63 abonnés 399 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 1 décembre 2013
    Il y a quelques images d'anthologie dans "Françafrique". Par exemple, Omar Bongo expliquant sur un ton patelin, avec un sourire jusqu'aux oreilles, que "les relations avec Total ou Elf, ça ne change pas. C'est la transparence. Ca a toujours été la transparence." Ou alors Albin Chalandon, à l'époque PDG d'Elf, débarquant de son avion à Port-Gentil, le grand terminal pétrolier gabonais, costume Saint-Laurent claquant au vent, sourire carnassier et Ray-ban opaques en bandoulière. On peut dire ce qu'on veut, mais à cette époque, la politique africaine de la France, elle avait de la gueule - ça nous change d'aujourd'hui, avec BHL qui part faire son auto-promotion en Libye et cette intervention au Mali chiante comme la pluie. On fout toujours autant la merde là où on passe, mais maintenant, en plus, on essaie de faire croire qu'on est "gentils", qu'on vient pour défendre la justice - alors que Chalandon, Foccart, Maurice Robert, Maurice Delauney, Bob Denard et leurs amis n'ont jamais eu cette hypocrisie. Au-delà de ces quelques images saisissantes, le film expose, dans ses grandes lignes, l'évolution de 50 ans de politique française en Afrique, du maintien d'un système de dépendance directement hérité de l'empire colonial, sur fond de Guerre froide et de besoins pétroliers à satisfaire, au rééquilibrage progressif du rapport de forces dans le cadre de la mondialisation, assorti de circuits d'influence et de financement occultes qui perdurent. Tout cela est bien connu. Il ne faut pas attendre du commentaire, assorti comme il se doit d'une musique qui souligne le côté glauque de tout ça, autre chose que le prêchi-prêcha moralisateur habituel: les salauds de Français, les pauvres gentils Africains, les dirigeants corrompus, etc. On ne montre évidemment que ce qui alimente cette vision - en évacuant, par exemple, toute comparaison avec ce qui s'est passé dans les régions africaines où la France n'était pas présente, qui, comme chacun sait, se sont révélées des modèles de démocratie et de développement harmonieux (Liberia, Soudan, Ethiopie, etc.). Passage croustillant quand, pour vilipender le soutien de la France à l'armée biafraise, on nous montre un laïus du général nigérian Benjamin Adekunle (le "Scorpion noir"), qui vilipende l'interventionnisme français alors qu'il est le principal responsable de la stratégie de blocage de l'aide humanitaire et de la destruction par la famine de la résistance Ibo au Biafra. On nous parle du "pillage" par la France des ressources de l'Afrique, au mépris des intérêts des Africains, mais on ne parle jamais de son pendant: la mise en place d'une immigration de peuplement africaine en France, pour laquelle on n'a pas non plus demandé l'avis des Français, à l'origine de transferts de fonds massifs des populations transplantées vers leur pays d'origine. Enfin, on peut noter le parti pris politique du réalisateur à certains détails amusants. Son apologie de Laurent Gbagbo, dont on tait qu'il a été jusqu'au bout de sa carrière un grand ami du PS, qui se fera débarquer quelques mois après le bouclage du film et est actuellement en jugement à La Haye pour crimes contre l'humanité. Son traitement pour le moins rapide des "années Mitterrand" et des exploits de Papamadi, fils et M. Afrique du président, qui n'apparaît que quelques secondes; et sa longue liste des personnalités arrosées par Bongo - toutes de droite, alors que plusieurs intervenants insistent sur le fait qu'Omar, pragmatique, se faisait un devoir d'arroser tout le monde et que le personnel politique français au grand complet faisait la queue dans sa salle d'attente. "Françafrique" n'échappe donc pas aux travers de l'industrie française du documentaire, qui est de fait une arme de propagande au service de la pensée dominante et de la couleur politique (la gauche) qui domine le monde des médias. Le panorama qu'il propose, même si d'un intérêt réel, doit donc être contemplé avec une bonne dose de distance critique.
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 9 novembre 2010
    J'ai vu "Françafrique" lors d'une avant première. Les 80 premières minutes (1ère parte) sont d'un très bon niveau. La françafrique y est définie, grâce aux aveux de ses grands commanditaires, conforme à la synthèse formulée par François Xavier Verschave dans Noir Silence (même si ce dernier n'est pas cité) : coups d'Etats, mercenaires, ventes d'armes et pillage des matières premières, qui font de l'indépendance des anciennes colonies de l’Empire français une poursuite de la colonisation de la France en Afrique. Cette première partie est loin d'être complète, de nombreux assassinats, guerres, morts ou pays sont oubliés, mais le but énoncé est de démontrer la logique et la continuité d’un système tout au long de la Vème République, et c’est réussi. Didactique et clair, tout le monde devrait voir ce film, courageux et indépendant, pourrait-on croire... avant de voir la seconde partie. Comme on aurait du s'y attendre, le documentaire y prend un très mauvais tournant. Ce qui est extraordinaire avec la Françafrique, c’est que quelle que soit la date où la TV en parle, c’est toujours quelque que chose de "terminé" et "qui appartient au passé" ! Encore une fois. La formule magique qui marchait en 1980, renouvelée chaque année avec une même continuité nous est resservie en 2010... C'est tellement grotesque, que peut être cela se verra, on peut être optimiste, ou pas. En effet, les journalistes se basent notamment sur un discours de Ali Bongo et Nicolas Sarkozy pour dire que les pratiques on changé, "oubliant" aussi une bonne part d'actualité. Pauvres mercenaires, ils doivent sûrement être au chômage ! Dormez braves gens, tout va bien, désormais. De l’art d’éteindre toute mobilisation en feignant l’information, le peu de faux passe bien mieux après 98% de vrai… C’est déjà ça. (Entre parenthèses, le génocide des Tutsi du Rwanda, n'a visiblement jamais eu lieu.) A voir quand même, on en apprend beaucoup.
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