Un très bon film noir, classique du genre, qui repose essentiellement sur les épaules de James Cagney, extraordinaire, et sur la singularité du personnage qu'il compose. C'est un grand enfant qui voue une adoration trouble à sa mère mais se méfie de sa femme. Un homme tourmenté par d'horribles migraines. Un psychopathe brutal qui ira jusqu'au bout de son délire mégalo dans une scène finale explosive et infernale, d'anthologie. "Si vous demandiez à Jimmy Cagney quel est son plus grand film, il vous répondrait probablement White Heat", écrit Raoul Walsh dans ses Mémoires. Il ajoute : "L'histoire nécessitait une action parmi les plus perverses que j'ai jamais mises en scène. Je savais que je pouvais faire confiance à Cagney. Mais il m'a étonné par l'intensité qu'il a mise dans la scène du réfectoire. C'était probablement un des plus grands moments d'interprétation de tous les temps..." (voir Le Film noir américain, de François Guérif). Au cours de cette scène, saisissante en effet, Cody Jarrett apprend la mort de sa mère et devient fou de douleur et de rage, hurlant et rampant sur une table, puis frappant tous les gardiens venus l'arrêter. Au début du film, Cagney avait également eu l'idée de faire asseoir son personnage sur les genoux de sa mère... Ce lien mère/fils, oedipien, donne au drame des accents de tragédie grecque, renforcés par l'évocation de la légende du cheval de Troie, au moment du braquage final. Voilà qui fait le sel de ce film. Ajoutons enfin au rayon des qualités quelques répliques qui tuent, une mise en scène dense et rythmée, un bon suspense.
Le titre français du film, L'Enfer est à lui, est un peu éloigné du titre original, White Heat, mais colle avec le dénouement. Ce titre fait aussi écho à celui d'un autre film de Raoul Walsh, Le Monde lui appartient (The World in his Arms, 1952). Ces deux titres donnent une juste idée du caractère des héros walshiens, qui ne font pas dans la demi-mesure...