Oh ! Un film ! En cette année morose de 2012, j'en serais presque surpris. Et pour être honnête, c'est peu dire que je ne l'attendais pas venant de Coppola, un auteur dont la vieillesse était jusqu'alors pour moi synonyme d’égarements... Bah oui, c'est quand plus je n'étais même pas fan de ce que le maître produisait ces derniers temps : "L’homme sans âge" m'avait séduit pour l'idée mais totalement laissé sur le côté dans sa façon de s'éparpiller à droite à gauche en oubliant l'essentiel ; quant à "Tetro", j'ai tout simplement été assommé par la vacuité de la démarche, purement formaliste mais sans aucun fond. Mais au moins, dès à présent, ne pourrais-je jamais reprocher à Coppola d'être un jusqu’au-boutiste, car si je reste parfois totalement en dehors de ses trips, il m'arrive comme c'est le cas pour ce "Twixt" d'être en totale synchronisation avec la démarche du bonhomme et là – ouahou ! – quel pied ! Le pire, c’est qu'il était arrivé ces derniers mois de me demander si je venais d'une autre planète face à la forme que prenaient les dernières productions du moment. Or, face à "Twixt", tout est apparu si évident. Bah oui, quand on assume son univers de bout en bout ; qu'on y met de la délicatesse dans la réalisation ; quand on sait tirer parti des arts numériques pour offrir une œuvre équilibrée, et surtout quand on a quelque-chose à dire, eh bien on a un film qui n'ennuie pas une seconde. Du moins, me concernant, ce film ne m'a pas fait regarder un seul instant ma montre. Il était d'une telle densité ! Chaque scène se justifie, apporte son ingrédient qui enrichit l'œuvre. Jamais on ne perd de temps inutilement. Bref, la maîtrise du rythme est parfaite. Même si Coppola brasse du grand classique, son exceptionnel talent pour la narration filmique et sa grande sensibilité d'artiste font que cet univers m'est apparu totalement unique, et qu'à chaque instant je voulais en découvrir davantage. Ainsi, de simplement curieux lors de la première demi-heure, j'en suis devenu totalement subjugué pour le final. L'écran de fin était-il à peine apparu que je criais « encore ! » Franchement, vieillir comme ça pour un artiste, c'est beau. Burton devrait prendre des leçons en terme de construction d'atmosphère et de renouvellement des thèmes. De même, Scorsese pourrait aussi s'inspirer d'autant de pureté et de simplicité pour un auteur qui a pourtant déjà tout fait et tout connu. Et pour tous les autres, qu'ils voient "Twixt" et qu'ils comprennent enfin ce que c'est de marier délicatement les opposés, de jouer d'ironie, ou bien encore d'assimiler pleinement les nouvelles technologies au service de sa propre expression. Alors – c'est sûr – il ne plaira pas à tous ce "Twixt" ; il risque même fort de diviser la population en deux catégories distinctes sans intermédiaire : ceux qui adorent et ceux qui détestent. Mais franchement on s’en fout, du moins moi je m’en fous royalement. Je préfère de loin voir trois films à la Coppola où un seul me transcende pendant que les deux autres me passent au travers plutôt que d'avoir à me coltiner que ces productions monotones qui remplissent actuellement les salles. En somme, heureusement que des artistes sont encore présents sur cette Terre. En d'autres termes : « Putain ! Merci Francis d’être encore vivant ! »