Top Gun: Maverick : les secrets du tournage

L'idée d'un Top Gun 2 émerge vaguement fin 2010, mais sans Tom Cruise. Deux ans plus tard, le président de la Paramount, Adam Goodman, confirme que cette suite se fera avec l'acteur, mais aussi avec le retour de Tony Scott à la réalisation et Jerry Bruckheimer à la production. La firme fait appel à Peter Craig pour écrire le scénario. Mais le suicide de Scott cette même année remet le projet en question.

En 2014, le célèbre producteur annonce que ce deuxième opus prendra compte de l'évolution du monde moderne : "Les pilotes sont devenus obsolètes à cause des drones. Tom Cruise va leur montrer qu'ils ne sont pas obsolètes. Ils sont là pour rester". L'année suivante, les choses se concrétisent : Justin Marks est engagé au scénario pour poursuivre ce qu'avait commencé Craig.

En juillet de la même année, Tom Cruise évoque le projet, déclarant vouloir limiter les effets numériques... En 2017, l'acteur confirme cette suite. Peu de temps après, Joseph Kosinski (Tron l'héritage) est choisi à la réalisation. En 2018, Val Kilmer confirme son retour. Miles Teller est ensuite annoncé dans le rôle de Bradley Bradshaw, fils de Goose Bradshaw joué par Anthony Edwards dans le premier volet.

Le film est ensuite repoussé d'un an, Cruise voulant, avant de se lancer dans le tournage, apprendre à piloter un avion de combat !

Doté d'un budget de 15 millions de dollars, Top Gun en avait rapporté environ 357 dans le monde en 1986 via sa sortie en salles (il s'agit du plus gros succès de l'année). Ce film a par ailleurs propulsé Tom Cruise au rang de star mondiale.

Le budget de cette suite est de 140 millions de dollars, soit 125 de plus que son prédécesseur !

Avec Top Gun : Maverick, Joseph Kosinski retrouve Tom Cruise qu'il avait dirigé dans le film de science-fiction Oblivion sorti en 2013. Le metteur en scène fait également à nouveau tourner Miles Teller et Jennifer Connelly après le film sur les pompiers d'élite Line of Fire (2018).

Si Tom Cruise et les autres acteurs ont appris à piloter des F/A-18 (dont le prix à l'unité est de 70 millions de dollars) et sont réellement présents dans les avions (grâce à un entraînement intensif de cinq mois, ils se sont habitués aux principes fondamentaux du vol et de la force G, une unité d'accélération correspondant à l'accélération de la pesanteur), ce ne sont pas eux qui pilotent.

En revanche, ils ont dû prendre la place du réalisateur dans le cockpit, jouer leurs dialogues et filmer en plein vol (ils ont donc dû apprendre à filmer et à cadrer).

Par ailleurs, les pilotes de la Navy pilotant réellement les avions au moment du tournage ont eux aussi dû être formés. Tom Cruise se rappelle : "Nous avons formé des acteurs pour qu'ils soient capables de voler et de jouer dans de vrais F/A-18. Et, pour ce faire, nous avons pris les meilleurs pilotes de chasse du monde de la Navy américaine et nous leur avons enseigné les techniques de cinéma - le pilote et l'acteur devaient travailler en équipe. C'est la sophistication des séquences aériennes. Personne n'a jamais fait ça, jamais."

La participation de Joseph Kosinski au film a commencé à Paris, lorsque Tom Cruise tournait Mission Impossible - Fallout. "J'ai eu 20 minutes avec Tom pour lui présenter mon point de vue, et je savais qu'il y aurait deux exigences : premièrement, l'histoire devait être profondément émotionnelle. Deuxièmement, le film devait être tourné de manière physique", se souvient le cinéaste.

C'est à la fin du tournage de La Firme (1992) que le cinéaste Sydney Pollack, connaissant la passion de Tom Cruise, a offert à ce dernier des cours de pilotage. L'acteur a alors obtenu très rapidement sa licence IFR (Vol aux Instruments), à la grande surprise de Pollack :

"Donc, six semaines plus tard, j'ai emmené Sydney dîner... Et il m'a dit : Espèce d'enfoiré ! Tu as appris à voler aussi vite ?. J'ai répondu : Oui, mais c'était très dur. Il m’a juste lancé un Va te faire foutre. Sydney disait : L’IFR, qui est la prochaine qualification, m'a pris des années, ça va te prendre du temps."

"Donc, un peu plus tard, je l'ai emmené dîner... Nous sommes en train de manger et à la fin, je dis Je vais payer l'addition, et j'ai ouvert mon portefeuille, je l'ai posé sur la table en sortant mon argent, et il a regardé dedans : il y avait ma licence IFR à l'intérieur."

"Il a dit : "Espèce d'enfoiré ! Qu'est-ce que tu fais ?! C'est quoi le problème, Sydney ? Prendre des années... Je n'ai pas d'années à perdre, mec."

La première séquence que Joseph Kosinski a tournée est un traveling à grande vitesse de Tom Cruise sur une moto Kawasaki, vêtu de la veste en cuir et des lunettes de soleil Aviator de Maverick, faisant la course avec un F/A-18 sur une piste, le tout encadré par un coucher de soleil classique de Tony Scott :

"Top Gun, d'une certaine manière, est un fantasme. Le soleil est toujours en train de se coucher, une partie de volley-ball est en cours sur la plage, et le juke-box regorge de mélodies indémodables. Ce premier film est magnifique", se rappelle le réalisateur, en poursuivant :

"Tony faisait un blockbuster, mais il l'a tourné comme un film d'art. L'éclairage, les filtres dégradés, le cadrage. Il y a des moments dans notre film qui sont un hommage, stylistiquement, au film de Tony Scott. Certains jours, comme sur cette piste avec Tom, la moto et le jet, il fallait se pincer, on s'y croyait."

A l'origine, le rôle était convoité par de nombreux jeunes acteurs à Hollywood, dont Glen Powell, qui joue finalement Hangman.

Dans le film original, il n'y avait pas de femmes dans le cockpit parce que, au milieu des années 1980, il n'y avait pas de femmes pilotes de chasse. Monica Barbaro, qui joue Phoenix, confie : "À l'époque de Top Gun, les femmes pilotes n'étaient pas autorisées à voler au combat. Les forces armées américaines ont levé l'interdiction de combat en 1993. Quelques années plus tard, elles décollaient des porte-avions comme le reste des pilotes."

Pour former les jeunes acteurs à ce qu'ils devraient être capables de réaliser dans Top Gun : Maverick, Tom Cruise s'est rappelé du film pour lequel il a été le plus formé : Taps (1981). Le réalisateur Harold Becker et le producteur Stanley Jaffe l'ont en effet fait passer, lui et les jeunes co-stars Sean Penn, Timothy Hutton et consorts, par un camp d’entraînement militaire.

Val Kilmer, interprète de Tom "Iceman" Kazansky dans le premier opus, a une scène dans cette suite, malgré le fait que l'acteur a dû faire face à de sérieux problèmes de santé ces dernières années. Atteint d'un cancer de la gorge et ayant subi deux trachéotomies, il a presque perdu l'usage de la parole.

En amont du tournage, Tom Cruise et Jerry Bruckheimer ont rencontré le vice-amiral DeWolfe H. Miller III, chef des forces aériennes, commandant des forces aéronavales de la flotte américaine du Pacifique, pour lui exposer leur vision du film. L'acteur se souvient :

"Nous sommes allés lui expliquer l'histoire et lui avons dit : Nous allons le tourner en direct. Et nous allons engager les acteurs et les former, sinon nous ne le réaliserons pas. J'ai dit : Si vous ne voulez pas le faire, je comprends. Mais c'est l’unique manière de l’envisager."

"D'autres personnes demandaient : On ne peut pas tourner comme ça ? J'ai toujours dit : Vous pouvez. Je ne peux pas. Et la Navy a répondu, Oui, c’est d’accord pour nous. On va vous faire monter. On a gagné leur confiance, à chaque étape du processus. C'était un partenariat."

"J'ai dit : Je vais vous faire honneur, les gars. Voler signifie beaucoup pour moi. La Navy signifie beaucoup pour moi. Ils ont un esprit différent de celui d'un aviateur - tout simplement. Et je voulais rendre hommage à leurs valeurs."

Au début, certains milieux ont fait pression pour que les séquences aériennes du film soient tournées en premier. Tom Cruise s’y opposait : "Vous ne savez pas ce que c'est que de tourner une séquence aérienne. Tenez, on va faire un essai de tournage, pour évaluer ce que cela requiert. Nous avons donc fait mon premier test de vol à basse altitude avec un vrai pilote de Top Gun. Un grand pilote, nommé "Walleye".

"Le niveau de détail qu'il a fallu prendre en compte et le nombre de choses qui ont dérapé, d'un point de vue cinématographique, était énorme", s’amuse Tom Cruise. "Mais les images que nous avons obtenues étaient incroyables. Nous les avons montées et je leur ai montré les passages, et aussi les problèmes, parce que j'ai dit : Il ne s’agit pas simplement de mettre un acteur dans un F/A-18."

"Ils ne vont pas réussir à obtenir ce qu'il nous faut. Non seulement ils vont s'évanouir, mais il y a tellement de choses qui se passent dans cet avion. Il y a des caméras. Il y a l'éclairage. Il y a les performances. Nous devons créer un système de soutien complet pour ces gars, pour qu'ils soient à l'aise dans ce contexte. Il faut qu'ils encaissent des G. Ils doivent voler très bas. Ils doivent vivre tout ça dans cet avion."

Ce système de soutien s'est construit autour de cinq mois d'entraînement de vol intense, Tom Cruise créant un programme donnant aux jeunes acteurs des objectifs quotidiens sur mesure et enrôlant des instructeurs pour leur apprendre d'abord à se sentir à l'aise avec l'aviation, puis à apprendre à voler et enfin à être capable d'encaisser des G. Chaque jour, ils devaient remplir un formulaire détaillé sur le déroulement de leur journée, pour que Cruise puisse ensuite ajuster et personnaliser chaque programme individuel.

Miles Teller a pris sept semaines de cours de piano pour pouvoir jouer pour de vrai dans la scène où Rooster, imitant son père dans l'original, chante Great Balls Of Fire dans le bar.

Les jeunes aspirants pilotes ont commencé leur formation dans des Cessna 172 Skyhawks monomoteurs, puis sont passés à l'Extra 300 : "Dans l'Extra, c'était plus acrobatique, on pouvait commencer à tirer des G. Ensuite, je pouvais envoyer un autre avion près d'eux, afin qu'ils puissent commencer à se sentir à l'aise dans les airs tout en ayant d'autres avions dans les parages. Il est plus difficile de s'asseoir dans un avion et de prendre des G que si vous le pilotez vous-même."

"C'est comme si vous étiez un passager dans une voiture de course. Le conducteur sait quand il est sur le point de tourner, même si ça se joue dans une fraction de seconde. Vous êtes capable d'anticiper quand vous conduisez. Vos muscles, votre respiration, chaque partie de votre corps se prépare à ce virage, à l'apparition des G. Ainsi, les acteurs ont dû effectuer des manœuvres de voltige sans voler", précise Tom Cruise.

C'est la force G qui a motivé la décision de tourner la plus grande partie de Top Gun : Maverick de manière aussi pratique que possible, leurs effets sur le corps humain étant si évidents qu'il n'était pas question de faire semblant de voler. Cette recherche d'authenticité a poussé Tom Cruise et ses co-pilotes à entraîner leurs corps pour supporter cette pression extrême. Le comédien explique :

"Actuellement, sur terre, une seule force de gravité s'exerce sur notre corps. Deux G correspondent à deux fois le poids de notre corps. Trois, c'est trois fois notre poids 21 corporel. Donc, si quelqu'un qui pèse 90 kg prend deux G, il ressent presque 200 kg."

"Dans ce film, les acteurs prennent sept G et demi ou huit G, donc si vous pesez 90 kg, cela représente une force de plus de 725 kg qui écrase votre corps et expulse le sang de votre cerveau. Votre champ de vision se rétrécit et cela force tout le sang à descendre vers vos jambes. Vous devez vous entraîner pour ne pas tomber dans ce qu'on appelle le G-LOC, où vous perdez connaissance."

Top Gun : Maverick devait être diffusé dans les salles françaises en juillet 2020, mais a été décalé à juillet puis novembre 2021, pour enfin sortir en mai 2022, en raison de la pandémie de Covid-19.

Pour l'avant-dernière étape de la formation (avant la formation au pilotage des F-18), les nouvelles recrues se sont retrouvées dans des jets monomoteurs L-39 Albatros : "Ils ont dû s'habituer à filmer dans un jet de tournage différent, car chaque fois que je les mettais dans un F/A-18, nous devions tourner."

"La Navy n'est pas à notre service. Donc, ce n'est pas seulement une question de budget. C'est une question de respect pour les pilotes et les gens. Je savais que chaque fois que ces gars étaient là-haut [dans un F/A-18], je devais obtenir des images. J'ai dit à la Navy : "Mes hommes seront prêts"."

"Être prêt, bien sûr, ne signifie pas seulement être capable de s'asseoir dans un jet sans s'évanouir ou vomir. Cela signifie être capable de faire ces deux choses, puis d'agir, tandis qu'un défilé de véritables casse-cous de la Navy vous entraînent à travers une série de manœuvres à couper le souffle."

"Et la montée finale dans les F/A-18 a vraiment été à la hauteur de l’attente des acteurs, les vrais pilotes de la Navy les emmenant faire le vol de leur vie en réalisant une série de séquences qu'il faut voir pour y croire", se remémore Tom Cruise.

La chanson du film, Hold My Hand, est signée Lady Gaga et a été écrite spécifiquement pour le film par la chanteuse et BloodPop. Le clip est réalisé par Joseph Kosinski, qui a obtenu son billet pour diriger Top Gun Maverick à Paris, sur le tournage de Mission : Impossible Fallout, après une entrevue de vingt minutes avec Tom Cruise pour lui pitcher son approche.

A bord d'avions de la Navy, Tom Cruise et ses co-stars ont emprunté certains des parcours les plus difficiles d'Amérique, comme le Rainbow Canyon et la chaîne des Cascades dans l'Etat de Washington. Cruise s'est également élancé du pont du fameux USS Theodore Roosevelt :

"Sur le Roosevelt, nous avons pu faire un lancer catapulté avec Tom dans un F/A-18 et tout filmer. Il a effectué quatre ou cinq lancements. Personne n'avait jamais fait cela dans un film - c'est quelque chose que seuls les aviateurs de la Navy savent faire."

"Et il n'a pas seulement fait un catapultage, il a aussi accroché le brin d'arrêt à l'atterrissage, ce qu'on peut voir dans le film. C'était une expérience incroyable. Physiquement épuisante, et difficile pour l'équipage", se souvient le metteur en scène Joseph Kosinski.

Kelly McGillis, campant dans le premier Top Gun la femme qui faisait chavirer le coeur de Tom Cruise, n'est pas présente dans ce second opus. Interviewée par Entertainment Tonight, la comédienne (qui s'est quasi retirée des plateaux de tournage depuis un bon moment) avait confié :

"Personne ne m'a contacté et je ne pense pas qu'ils y aient pensé. Je suis vieille, je suis grosse et je fais mon âge. Ce n'est pas ce qu'ils cherchent, mais je préfère être bien dans ma peau à mon âge plutôt que de faire semblant."

Le personnage du jeune pilote "Bob" est campé par Lewis Pullman. Son père à la ville n’est autre que le comédien Bill Pullman, qui jouait l’inoubliable président-pilote Thomas J. Whitmore, lancé dans un combat aérien contre les extraterrestres à la fin de Independence Day. Tel père, tel fils !

Le match de football américain sur la plage dans Maverick, clin d’œil évident à la cultissime scène de beach-volley du film original, a été tournée deux fois. Mécontent du résultat, Tom Cruise a ainsi imposé de nouvelles prises de vues à ses jeunes partenaires… Qui ont donc dû passer nuit et jour en salle de gym pendant une semaine pour retrouver leur physique perdu après avoir un peu trop célébré la fin du tournage à grands renforts de milkshakes et de bières !

Glen Powell a tout récemment obtenu son diplôme de pilotage suite à son entrainement intensif sur le tournage de Top Gun : Maverick.

Le personnage de Penny Benjamin, nouvelle venue dans Maverick campée par Jennifer Connelly, était déjà évoqué au détour de deux scènes de Top Gun en 1986, à travers un dialogue entre "Goose" et "Maverick" puis entre Meg Ryan et Tom Cruise, suggérant que le pilote avait batifolé avec la fille d'un amiral.

Tom Cruise sera de retour au Festival de Cannes pour présenter Top Gun : Maverick (sélection officielle, hors compétition), le 18 mai 2022, soit une semaine avant la sortie nationale du film. A noter que l'acteur s'était déjà rendu sur la Croisette, en 1992, pour la présentation hors compétition du film Horizons lointains de Ron Howard, dans lequel il donnait la réplique à Nicole Kidman.

Top Gun Maverick est dédié à Tony Scott, réalisateur du film original (sur lequel il sera viré et réengagé à trois reprises !), tragiquement disparu en août 2012 après avoir mis fin à ses jours. Une projection privée de Top Gun avait été organisée pour lui, Tom Cruise et le producteur Jerry Bruckheimer en 2010, afin de lancer la réflexion sur la production d’une suite.

"Le soleil est toujours en train de se coucher, une partie de volley-ball est en cours sur la plage, et le juke-box regorge de mélodies indémodables", explique Joseph Kosinski. "Ce premier film est magnifique. Tony faisait un blockbuster, mais il l'a tourné comme un film d'art. L'éclairage, les filtres dégradés, le cadrage. Il y a des moments dans notre film qui sont un hommage, stylistiquement, au film de Tony Scott. Certains jours, comme sur la piste avec Tom, la moto et le jet, il fallait se pincer, on s'y croyait."

Le producteur Jerry Bruckheimer et Tom Cruise ont catégoriquement refusé que Maverick fasse appel aux images de synthèse, afin de livrer l’expérience la plus authentique possible. Ils se sont également opposés aux propositions de différentes plateformes de streaming au moment de la pandémie, afin de réserver le film pour le grand écran.