J'en conviens, cette note est sévère, hésitant à lui accorder une étoile supplémentaire. « Festen » avait du potentiel et il serait vraiment malhonnête d'écrire qu'on reste totalement insensible à ce récit dur, cru, portrait de famille cinglant et critique sans fard d'une bourgeoisie à l'indifférence, l'indécence sans limite. Certaines scènes interpellent, notamment dans la dimension très cruelle que peut avoir le scénario,
le racisme ou la violence de classe explosant suite à l'arrivée d'un nouveau personnage
faisant notamment froid dans le dos. Malheureusement, malgré une interprétation impeccable et des protagonistes relativement complexes, je n'ai pas aimé « Festen ». C'est l'un des très rares cas où j'ai même regretté de ne pas avoir eu l'occasion de le voir à la télé tant sa découverte sur grand écran m'a paru superflue. Vous me voyez venir : à 80% (voire plus), la raison de mon rejet vient du « fameux » Dogme95, empêchant la moindre velléité artistique, une réelle immersion, la possibilité de créer le vertige à travers la technique ou les décors... Ça se veut plus réaliste, c'est juste pénible à regarder. Ce format 35 millimètres, cette photo immonde, cette lumière jamais contrôlée, ces pseudo-mouvements de caméra brutaux, ce son compressé empêchant toute fluidité... J'étais parfois sidéré devant l'impression de voir un caméscope échapper des mains du réalisateur ou à la vue de certains plans bringuebalants : non, vraiment, je n'ai pris aucun plaisir devant ce film, et même si j'ai bien conscience que ce n'était pas le but premier, rester autant sur le côté presque uniquement à cause de ses choix formels est plus que problématique. Même les qualités évoquées précédemment, réelles, restent inabouties par leur manque de structure, de continuité dans l'action, nous empêchant de réellement nous attacher aux deux seuls protagonistes sympathiques que sont Christian et la très belle Helene. Non, vraiment, si je lui reconnais le courage de s'attaquer à un sujet pour le moins délicat sans voyeurisme ni facilité, je ne partage nullement la relative unanimité autour de ce titre, et hormis « Italien for Beginners » que je regarderais par amour pour le cinéma de Lone Scherfig, il est très probable que mon expérience « dogmatique » s'arrête là. Au passage, je note que Thomas Vinterberg s'est depuis largement converti à un style infiniment plus classique, peut-être sans éclats, mais avec un indéniable soin formel le rendant autrement plus accessible et plaisant : comme quoi, il n'y a sans doute pas que moi à penser que ce mouvement était un vaste leurre...