Il faut sauver le soldat ryan, monument du cinéma sorti en 1998 par le grand Steven Spielberg. Troisième film du programme que j’ai lancé “un jour un chef d'œuvre".
L’idée du film est simple, poser un œil à la fois ultra réaliste sur cette seconde guerre mondiale sans oublier la psychologie d’une fiction. Le 30 septembre 1998 sort au cinéma le récit d'hommes risquant leurs vies pour en sauver qu’une. C’est une histoire simple avec une immense toile de fond. Le capitaine du commando est John Miller, incarné par l’un des plus grands acteurs du cinéma, Tom Hanks. Avec lui notons la présence de l’excellent Tom Sizemore (Sergeant Horvath), d’un très jeune Vin Diesel (Adrian Caparzo), du rebelle Edward Burns (Soldat Reiben), du journaliste Jeremy Davis (Caporal Upham) ou encore du redoutable tireur d’élite Barry Pepper (Soldat Daniel).
Pour retracer une fresque aussi impressionnante, le tournage commence le 27 juin 1997. Plusieurs acteurs furent envoyés dans un camp militaire durant plusieurs jours afin de se préparer aux conditions rencontrées par les soldats de 1944. Le but étant de respecter selon l’auteur ce que vivaient les vétérans. On ne sort pas indemne d’une telle immersion.
Le budget hallucinant pour l’époque de 70 millions de dollars débloqué par Spielberg reste pour autant assez faible par rapport à ce que représente le long métrage. L’unique scène du débarquement coûte plus de 12 millions de dollars impliquant plus de 1500 figurants pour la plupart réserviste de l’armée Irlandaise. Plus de 2000 armes sont également utilisées. Tous les détails du débarquement du soin apporté aux costumes jusqu’au mal de mer des troupes américaines s’ajoutent à ce réalisme.
Le débarquement de Spielberg est une claque monumentale. La mise en abyme de son auteur s’installe avant même d’avoir posé le moindre pied à terre, gros plans sur des visages, regard apeuré, main qui tremble, tout est dans le non-dit et le travail du son. La seule chose que peut ressentir le spectateur c’est cette peur, cette crainte et les mots de leur capitaine.
Pour les acteurs ce n’est pas une expérience classique du cinéma presque plongé au sein même de cette date du 6 juin 1944. L’occupation du cadre est parfaite, les corps sans pile autour de nous suivie d’un Tom Hanks l’espace d’un regard vision d’un public apeuré. Le but n’est pas de mettre en avant la grandiloquence américaine ni même la moindre impression de victoire.
Si Omaha beach est un succès, elle est au prix de ce que le réalisateur nous dévoile corps à perte de vue, explosion, larmes, traumatismes immédiats auxquels doit faire face le capitaine Miller. Voilà comment intervient pour la première fois cette sensibilité. Spielberg pose les bases de son histoire sur près d’une demi heure de combat avant que le calme n’arrive enfin et avec lui les premières notes du musicien John Williams. C’est là tout le génie de sa mise en scène aussi bien visuellement qu’émotionnement, comment rester insensible à quelque chose dépassant largement le cadre du cinéma.
Jamais un film de guerre n’avait eu autant d’impact dès ses premières minutes. Les 5 oscars obtenus sont largement mérités.
Je ne pense pas que quiconque ait déjà vu l’étude d’une guerre comme cela.
La question est la vie de huit hommes vaut elle la peine de sauver celle du soldat Ryan ? Spielberg ne vous donnera pas clairement la réponse. Spielberg ne dresse pas uniquement le portrait d’une lutte contre le nazisme son envie d’où certaines libertés accordées à l’histoire et de transmettre une touche d’humanité, sensibilité via deux idées fortes, celle d’un homme ayant perdu les siens et ceux devant affronter l’idée de perdre les leurs pour le sauver. Plus encore que ces reconstitutions historiques ou même son prélude, c’est la poésie de ce chef d'œuvre sans nom qui m’a fasciné. Comment ne pas saluer la prestation extraordinaire de Monsieur Tom Hanks. Chef devenu père d’un groupe que tout oppose mais qu’une seule mission finira par rassembler. Il est proche de ses hommes mais gardant cette limite à la fois professionnelle et affective; il est l’humain mais aussi l'œil du public au cœur d’une tempête que lui seul peut maîtriser.
Ce film est un chef d'œuvre de sensibilité et d’humanité. Tout devient plus clair avec une seule scène.
Après la mort de Wade (Giovanni Ribisi), un allemand est capturé par les hommes de Miller. Toute la question est maintenant de comprendre le positionnement humain des personnages. Pour Upham, il est impossible de tuer un homme rendu, ayant discuté avec lui, il a cette naïveté que beaucoup de soldats peuvent avoir. La décision de Miller est tout autre, c’est son éthique qui prône cette libération, la question est comment ces liens familiaux interviennent t-il ? Une partie de son équipe ayant vu la mort d’un frère d’arme s’oppose à cette décision. Deux visions s'opposent alors à la caméra. L’humanité de Miller ne peut pas faire face à l’enfer de la guerre symbolisée par ses troupes. Rappelons que quelques secondes plus tôt l’auteur nous plongeait dans une scène émouvante, les larmes de Tom Hanks. Non, nous ne sommes pas avec des héros armés jusqu’aux dents, fiers, brutaux et surentraînés. La quête de Ryan nous place comme neuvième membres d’un groupe brisé ayant vécu ce combat depuis trop longtemps. Comme le dit Miller, chaque homme tué l’éloigne un peu plus de chez lui.
Ce qui frappe le plus le spectateur ce n’est pas le départ de Burns, ce ne sont pas non plus les remontrances d’un Tom Sizemore plus loyale que jamais, ce ne sont pas les mots d’un groupe polluant le cadre, ce qui frappe le spectateur c’est le silence, celui d’un homme Miller. Le commandement par le respect, fédéré par l’exemplarité sans montrer la moindre faiblesse à ses camarades. Si nous le savons très proches de ces hommes, il est particulièrement rare de le voir se livrer peut-être par pudeur et par sens du devoir. Pour la première fois, Tom Hanks se livre à un groupe devenu famille. C’est ce sens du commandement qui marque une vraie cassure avec d’autres leaders beaucoup plus grandiloquents sublimés par une photographie remarquable, le coucher de soleil Normand image l’ancienne vie de Miller.
Une fois attaché à ses hommes, leurs destins en est que plus tragique. Les derniers mots de Miller comme un symbole laissant libre cours à l’imagination du spectateur “mérite le” mérite ce sacrifice cette mission d’hommes ayant laissé leur vie pour sauver celle de Ryan (Matt Damon). Mérite d’avoir été tête d’affiche d’une fresque extraordinaire ayant façonné l’histoire du film de guerre, voyant Spielberg tout en haut du genre avec maîtrise, émotion, et justesse. Pour Miller et ses hommes, ce combat a véritablement permis de donner un sens à cette guerre qui n'en a aucun.
J’aurais pu citer plusieurs batailles poignantes, d’une mise en scène violente et cruelle à l’image de cette guerre. J’aurais pu vous écrire sur un casting d’une justesse hors normes entre dégoût et courage représentant au mieux cette dure humanité. Les superlatifs ne manquent pas pour décrire la claque reçue même via des séquences anodines. Si le cinéma est une émotion, voilà le long métrage de référence que l’on aurait tous adoré voir en salle. Chef d'œuvre cinématographique qui aura façonné mon esprit.