Présenté comme un film 4 étoiles sur son affiche, je dirais que oui, 4 étoiles mais pas une de plus. F est un très drôle d'objet, pas drôle dans le sens où on va se fendre la gueule (du moins pas nous) mais plutôt drôle comme bizarre, mais bizarre alors qu'il ne devrait pas forcément l'être.
Je m'explique.
F commence par un prof qui se fait agresser par un élève, part en congés maladie, se fait lâcher par sa hiérarchie, se découvre une nouvelle passion pour l'alcool, perd le feu sacré de l'enseignant investi d'une mission et voit sa vie personnelle se déliter. Un schéma sociétal somme toute classique me direz-vous. Et jusque là, cette petite descente vers la dépression est appréciable car un brin révoltante et surtout plausible. L'acteur David Schofield traîne sa gueule et son mal-être avec pas mal d'engagement et sa situation et ses relations conflictuelles avec sa femme et sa fille réussissent à susciter une certaine empathie.
Mais voilà, on est pas vraiment là pour s'émouvoir et disserter des problèmes du système éducatif. Encore que, peut-être est-ce là la volonté du réalisateur, je ne sais pas, c'est tellement maladroit. Toujours est-il qu'un soir, alors que l'établissement est quasiment vide, ne reste bien évidemment que notre homme au fond du trou et sa fille qu'il a collé, la bibliothécaire amoureuse transie, les deux "as" de la sécurité, la proviseure investie et détestable, le personnel d'entretien et une fille qui fait du sport peu vêtue. Tout ce petit monde va se retrouver aux prises avec une bande de jeunes subtilement affublés de sweats à capuches (qui je l'avoue font un petit effet en occultant complètement leurs visages) et de joggings, vêtements si distinctifs d'une partie de cette jeunesse qui brûle, casse, et disons le franchement, est en rébellion contre leurs aînés et les institutions. Personnellement, drôle de choix. Surtout qu'au delà de l'esthétisme, pourquoi les rendre si impersonnels alors que leur style les catalogue immédiatement ? Ah oui, et en plus, ce sont des amateurs de parcours, Yamakasi en puissance capable de bondir et de rebondir sans faire le moindre bruit, surement grâce aux bulles d'air de leur Air Max. Vous l'aurez compris, le choix du stéréotype du gamin de banlieue j'adhère pas, surtout que nos agresseurs resteront mutiques de bout en bout. Faites ce que vous voulez de notre violence, on ne s'embarrassera pas à l'expliquer et peut-être qu'on fait ça uniquement pour le plaisir. Où alors peut-être est-ce moi qui fait des raccourcis et amalgames sans m'en rendre compte à force de trop regarder TF1 ?
Donc ces petits sauvages vont prendre tout ce petit monde pour cible avec une certaine cruauté et sans faire de distinction. Je ne le cache pas, c'est un poil sanglant. Mais là où j'aurais aimé un peu plus de morceaux de bravoures à la mode survival, surtout avec un héros au bout du rouleau qui doit protéger sa fille (et accessoirement réassoir son rôle et son amour de père), je n'aurais pas été contre un peu plus de confrontations, de pétages de câbles et de résistance. Johannes Roberts dont ça doit être le film le plus personnel, se contente d'empiler les cadavres qui n'ont de sursis que celui que leurs agresseurs veulent bien leur donner. Mis à part une brève confrontation dans les dernières minutes du film (qui ne dure qu'1H15, heureusement), ça tombe comme des mouches. Un côté réaliste peut être, pour montrer que les héros n'existent pas mais du coup, cinématographiquement parlant, on patauge un peu dans l'ennui si ce n'est lors du final assez surprenant et judicieux ou un dilemme cornélien pointe le bout de son nez.
Dans le système de notation, F est la note la plus basse. Personnellement, je mettrais E pour ce F, pas parce que j'ai envie d'être sympa ou parce que je me dis qu'un F c'est humiliant et pas très encourageant pour la suite, pas non plus parce que j'ai peur de me prendre un coup de boule de la part d'un réalisateur un peu vexé. Certes il y a quelques moments sympas et les réactions de nos victimes en sursis sonnent plutôt justes mais F est bizarre, mal construit, peu oppressant et il tente de s'appuyer sur un sujet sérieux sans le traiter vraiment. Bizarre...