La meilleure façon de commencer cette critique, c’est de vous dire de retenir le nom de Sean Durkin. Car oui, avec son premier coup d’essai au cinéma signé Martha Marcy May Marlene, il démontre, en l’espace d’une heure quarante, qu’il peut s’inscrire avec grande fierté dans la catégorie des jeunes réalisateurs les plus prometteurs du moment! D’ailleurs, il est assez drôle, car c’est un fait rare, de faire remarquer que toute l’ambiance, la subtilité, et le charme du film, sont parfaitement retranscrits dans son affiche, absolument sublime. Ce qui emmène donc sur le premier point du film qui marque, son esthétique. A la fois glaciale, malsaine, mais aussi chaude et rassurante. Un doux mélange de ces deux aspects, qui finit par donner au film ce côté dérangeant assez particulier, mais terriblement accrocheur et passionnant si on se laisse charmer. L’histoire, quant à elle, prend la forme d’un double huis clos mis en scène avec une efficacité redoutable, l’un étant un événement passé se mêlant judicieusement à l’autre, événement présent, par le biais de flashbacks toujours pertinents, et en raccord avec le ressenti ou l’état d’esprit du personnage principal. C’est ce qui fait toute la force et la réussite du film, et qui lui permet par la même occasion de faire oublier son rythme assez lent, et de ne souffrir d’aucune longueur, ou en tout cas d’aucune longueur gênante qui viendrait en briser l’immersion. Le film reste très minimaliste dans sa mise en scène, mais offre avec une intelligence d’écriture rare au niveau du scénario, une histoire percutante, touchante, et intrigante jusqu’à sa toute dernière scène, qui aura le don d’en déstabiliser plus d’un par son côté inachevé terriblement osé, mais qui révèle à cet instant précis avec quel génie le film a réussi à transmettre, sans même que cela soit perceptible, toutes les émotions et les angoisses de son personnage central. Si Martha Marcy May Marlene marque les premiers pas de cinéaste de son réalisateur, on le retiendra surtout pour les premiers pas en tant qu’actrice d’Elizabeth Olsen, sœur cadette des célèbres jumelles du même nom, qui apparaît pour la toute première fois à l’écran. Et autant dire que personne ne s’attendait à ce qu’elle livre une prestation aussi saisissante et mémorable. On s’attache à elle dès les premiers instants où elle apparaît à l’écran, et reste du début à la fin le personnage le plus intéressant et captivant au vu de tout le mystère et de la complexité qui l’entourent, mais aussi de la crédibilité de celui-ci. Car s’il est vrai qu’à la base le personnage de Martha est superbement bien écrit, il devient rapidement une évidence qu’il n’aurait jamais pris une telle ampleur, et n’aurait jamais offert une telle force émotionnelle, sans la prestation de la jeune Olsen, accompagnée par une Sarah Paulson (American Horror Story) étonnante et touchante dans le rôle de la sœur désemparée de Martha. En conclusion: Premier film et premier chef d’oeuvre pour Sean Durkin. Mais encore plus que ça, Martha Marcy May Marlene se présente même comme l’un des meilleurs films de l’année 2012, quoi qu’il ne serait même pas exagéré d’en parler comme LE meilleur film. Une pépite du cinéma américain indépendant, minimaliste dans sa mise en scène, mais immensément riche dans son propos et dans le traitement de son personnage principal, campé par une Elizabeth Olsen qui est tombée sur le meilleur premier rôle qu’une jeune actrice puisse espérer pour lancer sa carrière, et qui dévoile tout son génie, à coup de grands frissons, dans son tout dernier plan, mémorable. Un film définitivement incontournable.