Mai 1945, Marie-Thérèse, Jeannette et Mireille quittent leur campagne française pour rejoindre le campement de Chesterfield dans le nord de la France. Après un mariage hâtif avec quelque Américain venu libérer le pays, elles doivent apprendre à devenir des ladies, avant le grand départ vers le nouveau monde.
C’est dans une atmosphère de Libération que s’ouvre le film, une vingtaine de jeunes femmes répondant à l’appel de l’inconnu, entassées dans le confort primaire d’un «camp cigarette» pour devenir dignes de la citoyenneté américaine.
Dix ans après son film La Dette, mettant en scène les tirailleurs sénégalais de la première guerre mondiale, Fabrice Cazeneuve donne ici la parole aux femmes.
Ce sont elles qui nous racontent leur après-guerre au travers d’une amitié, de trois destins croisés.
La caméra ne traverse d’ailleurs l’océan que lorsque chacune des trois héroïnes a atteint sa destination : l’Amérique.
L’Amérique, personnage à part entière, est omniprésente. Elle les réunit pour mieux les séparer, entre solitude des grands espaces de l’Alabama et vie mouvementée de Brooklyn ; elle les attire pour mieux les rejeter, étrangères à leur propre vie.
C’est un rêve américain que partagent ces jeunes Françaises, créatures exotiques et fantasmées des yankees. Le réveil n’en est que plus brutal.
A leur arrivée dans leurs nouveaux foyers, elles apprennent à connaître leurs jeunes maris, rencontrés dans l’euphorie et épousés dans la précipitation. Certains rentrent ravagés par la guerre, d’autres n’en reviendront pas.
Des actrices, récompensées par le prix collectif d’interprétation féminine au Festival de la fiction télé de La Rochelle 2010, on retient l’interprétation lumineuse; des paysages, entre campagne et vastes étendues, le caractère grandiose; des décors, l’esthétisme à l’américaine des images tournées à la Nouvelle Orléans.
Pour Mélodie Richard, interprète de Mireille, l’aventure, longue de quatre ans, a été avant tout humaine. C’est peut-être cette humanité qui transparaît à l’écran. Mêlant humour et émotion, le film retrace avec brio ces fragments de vie.
Cigarettes et Bas Nylon, c’est une dizaine de jeunes femmes en chemise de nuit écoutant un concert de jazz au coin du feu, un carton rempli de chocolat et de cigarettes, une amitié sur cartes postales, la Marseillaise chantée à tue-tête dans un bus américain.
Ce sont surtout trois femmes parties à la conquête de l’inconnu, qui prennent en main leur destin avec toute la force de leurs vingt ans. Si pour Victor Hugo «La femme a une puissance singulière qui se compose de la réalité de la force et de l’apparence de la faiblesse», Jeannette, Marie-Thérèse et Mireille ne viendront pas vous dire le contraire.
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