On pourrait qualifier "A Serbian Film" comme un exutoire des propensions mutines peut être refoulées, durant l'ère Milošević, dans les esprits pernicieux de quelques frustrés en manque de perversion.
A mes yeux ça reste une acerbe série B serbe. Le scénario me semble élaboré autour des deux sujets qui fâchent : violence et sexe et autour de deux thèmes : la dépravation et la descente aux enfers. Si on précise que cette dépravation est partiellement forcée et désincarnée et que la descente aux enfers est retranscrite par une surenchère de scènes choc, on peut supposer qu'on nous invite à faire le rapprochement avec ce qu'a pu ressentir le peuple serbe au cours des évènements qui ont fait parler d'eux dans les années 90.
Tout ce qui suit n'est que pure supposition :
Imaginons donc que le personnage principal "Milos", un Rocco Siffredi slave à la retraite interprété par le Mickey Rourke du coin, symbolise l'innocent peuple serbe pris en otage par un gouvernement tendance nationaliste et un poil belliqueux (le réalisateur Vukmir). Ce dernier lui promet un avenir serein, le manipule et le malmène après avoir pris le contrôle des forces de l'ordre, des media, des organismes de santé publique (etc.) et le pousse finalement à commettre l'irréparable pour expier les fautes de son dominateur. La morale étant que les méchants font autant d'opprimés dans leur camp, qui endurent le martyr psychologique tandis que les victimes directes succombent à la douleur physique. Une autre morale serait : "on est toujours le pantin de quelqu'un plus tortionnaire que soi".
C'est la seule interprétation que je puisse en faire, moi, pauvre ignorant des souffrances du monde. C'est pas pour autant que ça m'a marqué. D'ailleurs doit on s'en faire une interprétation ? Ou bien n'est ce finalement que de la cruauté gratuite. Car même en essayant de retenir un fond caché sur ce que ce film peut revendiquer, si ce n'est qu'une métaphore de la véritable férocité de l'humanité, c'est assez maladroit.
Techniquement rien à dire, la réalisation est maîtrisée, l'interprétation est très correcte, voire bonne. Le développement est classique et rappelle étrangement ce que nous servent régulièrement la dernière vague des cinéastes français de l'horreur (je pourrais en citer au moins 6 mais comme je me souviens pas de tous les noms et que j'ai pas envie de chercher, je m'abstiens pour cette fois). Ouais, non par contre ce sont les scènes choc en elles mêmes qui laissent sceptique. Franchement c'est pas terrible. J'ai vraiment ressenti ça comme si les mecs avaient blindé leur film avec tout ce qui peut être moralement incorrect pour des âmes pures. Et après, on dépose un brevet ? Ça se veut blessant, j'ai trouvé ça limite ridicule. En fait le seul sujet suggéré mais non traité c'est la zoophilie. Faut dire que les associations de défense des animaux sont beaucoup plus vindicatives que celles de défense des droits de l'homme. On découvre cependant un florilège de sadisme haut en couleurs, pédophilie, nécrophilie, inceste... peut être même un message à l'attention de Bayer : "Viagra Kills". Mais tout cela est montré dans l'excès, à la déraison, genre "ouais mais dans mon film c'était un bébé de moins d'une minute, on peut pas faire mieux (pire)". C'est même risible lorsqu'on nous montre la variété des orifices violés (cf le chauve vers la fin). Et au final ça n'a pas de sens. "Il manquait peut être un peu de religion ou de minorités raciales dans votre soupe dégueulasse, non ? Ah oui, censuré au montage, comme la scène avec l'âne ?" Bon c'était peut être destiné à un certain public aux moeurs douteuses que ça fait peut être vibrer, ou bien faute de marketting à se faire de la pub gratuite au rayon provocation. De toutes façons les noms de ces mecs sont déjà trop chiants à lire, comment pourrais je les retenir ? J'ai déjà tout vu je crois, plus rien ne m’impressionne, là ça va trop loin mais c'est trop piteux pour en être criant ou malsain.
J'aurais envie d'évoquer, pour conclure avec dédain, les paroles de la chanson "Say Just Words" de Paradise Lost (One Second ; 1997 - Music for Nations) qui illustrent assez mon ressenti :
You get high, with your destructive instinct -
You get high, with your corrosive instinct -
Where can I go, to escape your foul mind tricks -
You're trying it more, but you will never break me -
Cause you presume, the winner is you but that's not true, -
So say just words to me, unreal what your hate's providing, -
Say just words to me, your talk is always contradiction -
Say just words to me, you won't feel the warmth of friends around you -
Say just words to me, is it true that there is worth inside -
So say just words to me...