Bienvenue dans l’un des plus vignobles les plus reconnus de Saint Emilion. Un vignoble mené d’une main de fer par Paul de Marseul, épaulé par son fils Martin. Lorsque l’on sait que ce dernier se voit sans cesse reprocher son manque de "nez" en ce qui concerne les grands crus, le terme "épauler" ne correspond plus. En effet, Martin est victime des brimades de son père et souffre de son manque d’amour. Rejeté, le jeune homme peut heureusement compter sur le soutien sans faille de sa ravissante femme. Jusqu’au jour où Philippe, fils de l’un des plus proches amis de Paul, fait son retour en France. Pour de Marseul senior, Philippe représente tout ce que Martin n’est pas. Philippe est le fils qu’il a toujours désiré. Amateur de bons vins, « Tu seras mon fils » est fait pour vous ! Toutes les mimiques des goûteurs professionnelles et tout leur vocabulaire est soigné afin de coller à la réalité. C’’est pourquoi les connaisseurs risquent d’apprécier bien plus l’œuvre de Gilles Legrand que les non-initiés à l’art de la dégustation. Le film ne fait cependant pas preuve d’un sectarisme aveugle. Si tout comme moi, la passion du vin est pour vous un mystère, vous pourrez malgré tout apprécier un minimum « Tu seras mon fils » grâce à la profondeur des personnages (Paul, Martin et Philippe surtout), et aux excellentes interprétations. Niels Arestrup est très bon, mais a-t-il déjà été mauvais ? La bonne surprise vient du côté de Lorànt Deutsch, magnifique en fils qui ne trouve pas sa place dans un monde qui ne lui correspond pas. L’acteur est touchant dans toute la palette d’émotions qu’il dévoile. Comme lui, on aimerait haïr Philippe, mais comme lui, on ne le peut jamais vraiment totalement. Nicolas Bridet dégage quelque chose, une sorte de joie de vivre communicative, qui donne envie de le comprendre. Son ambition est noble après tout, il est lui aussi victime de la vision qu’a Paul de Marseul de lui. Finalement, on ne saura jamais vraiment pourquoi cet homme passionné est si dur et si borné dans sa vision du monde. Cela en est limite dommage, même si je reconnais volontiers que cela permet aussi de placer une barrière entre le spectateur et lui, à tel point que la fin du film ne provoque aucun sentiment. Elle est même presque bâclée, puisqu’elle ne propose aucune réflexion ni échange sur la nature du problème entre le père et son enfant. Ce léger manque de substance est compensé par de belles images. Les vignobles baignés dans un soleil couchant, les reflets d’une bougie sur un verre de vin rouge, les grandes étendues bordelaises, les caves poussiéreuses qui se retrouvent théâtres de sombres intrigues... La mise en scène n’est à aucun moment exceptionnelle, mais qu’importe. Le film dispose tout de même de nombreuses qualités.