Beaucoup de critiques l'ont fait remarquer et je les rejoins vraiment sur ce point : Tom Cruise est un acteur à part, capable depuis des années maintenant (sans trop y réfléchir, sans doute le premier Mission : Impossible) de multiplier les rôles d'actioners sans lasser, apportant juste ce qu'il faut de variations pour éviter l'overdose. Ici, il poursuit notamment dans la voie de l'autodérision empruntée par Jack Reacher, dont on retrouve le réalisateur (le très bon Christopher McQuarrie) au scénario avec Edge of Tomorrow. Rappelons quand même que le type avait signé le script d'Usual Suspects. Je ne sais pas si tout le mérite lui est dû, mais quoi qu'il en soit, on ne peut qu'apprécier la gestion admirable des boucles temporelles et la manière dont elles construisent le récit, très à même de maintenir le suspense et d'expliciter sans lourdeur les enjeux. De lourdeur, Edge of Tomorrow ne s'en embarrasse à aucun moment. C'est peut-être d'ailleurs cette volonté d'aller à l'essentiel et de supprimer toute aspérité d'écriture qui limite tout développement métaphysique ou psychologique plus poussé. Mais qu'importe, cette légèreté de ton, encouragée par l'humour et l'aspect très arcade, très jeu vidéo que prend cette histoire, fait de ce blockbuster un divertissement ultra efficace. Cela efface même certaines facilités, par exemple au moment d'expédier rapidement des questions complètement accessoires au déroulement de l'intrigue. On se foutrait même presque de la frêle crédibilité de certains choix de scénario tant Doug Liman arrive à surfer sur la vague du récit, dont la gestion du rythme est extrêmement facilitée par ce postulat die and retry décidément génial. Résultat, le film gère très bien l'évolution de l'intrigue, qui ne connait aucun temps faible et s'avère fun au possible. J'étais de plus très content de ne pas avoir à me coltiner des dérives inutilement héroïsantes (les troufions s'en allant plutôt vers la mort avec un cynisme assez intriguant, d'ailleurs entretenu par des références plutôt étonnantes concernant la seconde guerre mondiale) ou encore un étalage trop long sur l'existence militaire de la femme et ses implications, digressions qui finissent toujours par sombrer dans le cliché. D'ailleurs et sans doute de fait, le personnage d'Emily Blunt est développé de façon très correcte et permet à l'actrice d'exprimer son charisme, face à un Tom Cruise qui n'affiche que très peu son âge et parvient toujours, le bougre, à m'emmener avec lui. Un blockbuster qui fait tout dans la retenue et sait rester assez fin, bien que sans trop creuser les nombreuses thématiques qui s'offraient à lui. Qu'importe, Edge of Tomorrow ne se prétend guère plus qu'un divertissement, mais sait au moins, contrairement à la moyenne du genre aujourd'hui, acter cette intention avec une indéniable efficacité.