Faisons un bond dans le temps, début des années 80, nous en sommes encore aux prémices de la "Rambosploitation", les italiens commencent déjà à faire leurs propres versions réalisées aux Philippines avec notamment Ultime Combat (1983) d’Antonio Margheriti et les philippins ne sont jamais bien loin, puisqu’ils ont eux-aussi leur propre version avec Slash le découpeur (1984) de Jun Gallardo.
Cette fois-ci, c’est aux turcs de s’y coller et ça tombe bien, les plagias c’est leur grande passion puisqu’on leur doit (entre-autres) Turkish Star Trek (1973), Turkish Death Wish (1975), Turkish Superman (1979), Turkish I Spit on your grave (1979), Turkish Star Wars 1 & 2 (1982/2006) ou encore Turkish Shining (1988).
Avec Vahsi kan (1983), plus connu sous le nom de "Turkish Rambo", aussi appelé "Turkish First Blood", on se retrouve presque devant une copie carbone, puisqu’à peu de chose près, c’est exactement la même intrigue et que certains plans sont directement copiés à la virgule près du célèbre Rambo (1982).
Oubliez toutes les subtilités du film d’origine, vous ne les trouverez nulle part. ici, on retrouve Riza, un homme d’une quarantaine d’année qui se fait refouler à l’entrée d’un village par une bande de bikers (en lieu et place du shérif dans la version d’origine). Les bikers sont polis, ils le raccompagnent gentiment à l’extérieur village pour qu’il trace sa route. Sauf que Riza il est du genre à s’en battre les cou!lles à grands coups de bazlama (un pain turc) et décide ni plus ni moins de revenir sur ses pas, ce qui ne plait guère aux bikers qui décident de le dérouiller pour se venger (là où, dans la version d’origine, c’était les adjoints du shérif qui se faisaient la main dessus). Riza parvient à se libérer, leur casse la gueule et s’enfui en pleine forêt (ça y est, vous reconnaissez l’œuvre d’origine ?). Pour celles et ceux qui n’auraient pas fait le lien avec le film de Ted Kotcheff, Çetin Inanç enfonce le clou en y ajoutant le main theme de Rambo (composé par Jerry Goldsmith), tant qu’à copier une œuvre, autant ne pas faire les choses à moitié (ils iront jusqu’à le passer une dizaine de fois). La suite, on la connait tous, une fois dans la forêt, il se fera pourchasser jusqu’à l’arrivée des soldats. A la différence que ce film ne dure que 60min (et heureusement car il s’avère relativement mauvais), quand l’œuvre d’origine prenait le temps de faire les présentations et affichait 90min au compteur, ici, pas le temps de tergiverser, il faut vite rentrer dans le vif du sujet.
Non seulement le film reprend l’histoire d’origine mais en plus de cela, il plagie ouvertement quelques séquences, comme la scène où Rambo se fabrique une tunique avec un bout de tissus trouvé dans les bois, la scène où Rambo saute de la falaise pour fuir l’hélicoptère et se casse les côtes en chutant sur un arbre (on a droit à la même séquence, en plus cheap avec un mannequin en mousse et un montage rendant illisible la scène), sans oublier la séquence où Rambo se retrouve bloqué dans une grotte après que l’entrée ait été obstruée suite à une explosion (dans cette version, les trucs sont tellement badass qu’ils bouchent la grotte à l’aide de bulldozers et de dynamites).
Si seulement le film se contentait de copier/coller avec un tant soit peu de talent, on aurait pu leur pardonner et y prendre du plaisir, mais il n’en sera rien. Tout y est mauvais, du début à la fin. Tout sonne faux, même la scène la plus insignifiante comme la chasse du serpent dans la grotte où Riza va le manger cru. Même les bruitages sont flingués (et particulièrement usant à la longue car ils passent en boucle), entre les mobylettes et le tonnerre (qui ressemble à une porte qui claque). Même à la technique on sent l’absence de professionnalisme, il n’y a qu’à voir comment se démerdent les assistants qui n’étaient pas foutus de maintenir les réflecteurs correctement (sans que cela éblouisse les acteurs).
Enfin, il est amusant de voir de quelle façon Çetin Inanç a tenu à insister lourdement sur le côté puissant de son Rambo turc. Il nous dépeint un Riza badass alors que tout ce qu'il entreprend est complètement pété (avec ses pièges dans la forêt et ses lances enflammées qui explosent). C’est tellement bidon que pour appuyer une fois de plus sur le côté viril de son personnage, on retrouve Riza venant en aide à une nana (qui sort d’on ne sait où). Cette dernière n'était pas foutue de grimper sur un monticule de terre (d'une hauteur d’un mètre, s'en est même gênant de la voir galérer), il lui faudra l’aide de Riza bien évidemment pour l’aider à grimper ce mètre qui les sépare. Riza est tellement fort qu'en faisant une simple entaille sur la joue de ses assaillants, il parvient à les tuer (véridique).
Dans le rôle-titre, on retrouve Cüneyt Arkin, celui que l’on surnomme « le Alain Delon du Bosphore », totalement inexpressif, il parle peu mais qu'est-ce qu'il gueule. Le film vaut le coup d’œil ne serait-ce que pour sa performance, entre roulades dans l’herbe, sauts en hauteur et cache-cache. Çetin Inanç de son côté, nous offre des moments d’anthologie, au grès d’une mise en scène WTF avec des gros plans frontal façon Jean-Marie Poiré et un montage à la truelle qui aurait été supervisé par un malvoyant.
Quelques années après, Çetin Inanç remettra le couvert avec une suite, intitulée Korkusuz (1986), plus communément appelé "Turkish Rambo II". Oubliez Riza et Cüneyt Arkin, faites place à Serdar incarné par Serdar Kebapçilar. Il existe aussi un autre rip-off, sobrement intitulé Ramo (1986) de Mehmet Alemdar (oui, "Ramo" sans le "b").
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