Depuis ses débuts en 2001,avec "No Man's land", la carrière du bosniaque Danis Tanovic est exceptionnelle : en tout, 4 films, aucun déchet. Après avoir quitté l'ex-Yougoslavie de "No Man's Land" pour placer ses caméras en France ("L'enfer") et au Kurdistan ("Eyes of War"), Danis retourne chez lui, en Bosnie. Dans "Cirkus Columbia", il nous transporte dans une période importante de l'histoire de ce pays, celle qui se situe entre fin 1989 (chute du Mur de Berlin) et le début de la guerre entre serbes, croates et bosniaques. Le prétexte : après 20 ans d'exil en Allemagne où il a fait fortune, Divko, la bonne cinquantaine, revient dans son village natal dans sa Mercedes, plein de billets dans les poches, un chat noir qui lui a toujours porté bonheur et une bimbo rousse avec qui il compte se remarier après avoir divorcé de sa femme qui était, elle, restée au pays. C'est à peine s'il se souvient avoir un fils, 22 ans, radio amateur passionné. Très vite, on apprend qu'il a dû quitter le pays du fait des activités fascistes de son père pendant la 2ème guerre mondiale alors que la famille de son épouse soutenait le régime de Tito. Lorsqu'il arrive, le village est coupé en 2 : ceux restés fidèles à Tito et à l'idée d'une Yougoslavie réussissant à rassembler des gens ayant des origines et des religions différentes; de l'autre côté, ceux qui veulent "faire sécession". La grosse qualité de Tanovic, c'est de réussir à rendre léger ce qui est pesant, sans pour autant affadir l'importance des événements. Ce qui lui permet aussi de laisser passer une pointe de nostalgie par rapport à une époque, celle d'avant le conflit, où tout ne tournait pas autour de l'argent : "avec l'argent, tu peux tout acheter mais tu ne peux pas tout avoir", dit Divko à son fils. Miki Manojlovic, vu aussi bien dans "Largo Winch" que dans "Les marins perdus" ou "Irina Palm", est parfait dans le rôle de Divko. Boris Ler est une belle découverte dans le rôle de Martin, le fils de Divko. Autre découverte : Jelena Stupljanin, dans le rôle d'Azra, la rousse, finalement pas si bimbo. Mira Furlan, qui joue l'épouse restée en Bosnie, est également très convaincante. Comme d'habitude, on attendra avec impatience son prochain film. Peut-être le film quelque peu impertinent sur les religions qu'il m'avait dit projeter de faire il y a déjà 10 ans.