Superbe film, avec un rythme extrêmement maîtrisé, des plans révélateurs des enjeux de chaque mini-dispute, des acteurs impériaux et un fond d'une profondeur et d'une honnêteté remarquable.
Carnage est bel et bien une bombe à retardement jubilatoire. Illustration magistrale de la violence symbolique au début, le film est finalement d'une ironie décapante. Du politiquement correct au nihilisme, du féminisme au machisme, des bons sentiments aux pulsions nerveuses, tout y passe. Tantôt solidarités genrées, tantôt couple contre couple, puis conflit de valeurs et colère à l'état brut, Carnage semble aborder, avec une progressivité que l'on ne discerne même pas tant elle est subtile, toutes les formes de conflit social au sein-même de la classe aisée. L'opposition classe culturelle impliquée VS classe libérale matérialiste du départ se transforme peu à peu en un tas d'autres oppositions, plus subtiles les unes que les autres, et qui reflètent bien l'homme sous toutes ses contradictions. Je n'ai pas beaucoup ri au début, j'étais plutôt sans voix de me manger ainsi l'absurdité de la vie sociale en pleine gueule. Et puis à la fin, quand Kate Winslet et Jodie Foster disjonctent avec une implication magistrale, et que c'est les sentiments qui parlent, ceux qui viennent des tripes et qui oublient de s'attarder du côté du cerveau, sans filtre moral, éthique, ou social, là, mais je vous assure qu'on ri. On jubile. Parce que oui, c'est juste incroyablement jouissif.
Le constat final s'arrête quand même beaucoup, je pense, sur une vision assez nihiliste et désabusée. Mais je partage ce constat, et cela n'empêche en rien de donner ponctuellement un sens à sa vie. Un grand chapeau bas à Polanski pour ce film superbement lucide et subtile.