Jean-Charles Hue, plasticien et vidéaste, nous invite à passer 1h24 en immersion auprès de Yéniches, communauté de gens du voyage. Le réalisateur s'est immiscé dans la vie de la famille Dorkel pendant 5 semaines et a filmé sans donner d'indication, chopant le quotidien du camp et écrivant en parallèle son scénario. Il en découle un film hybride, un docu-fiction, qui rappelle l'émission culte Strip Tease mais qui dans sa maîtrise du cadre, son esthétisme et son histoire nous ramène toujours au coeur du cinéma. Les héros de La BM du Seigneur se sont Fred, Jo, Moïse et Nina, leurs voisins et amis avec qui ils vivent en totale autarcie loin des gadji. Une population dans laquelle on respecte et on écoute ses aînés, où l'on règle les problèmes avec les poings, où l'honneur ne doit jamais être bafoué. Le film n'idéalise pas la communauté, les hommes sont machos, les femmes sont au second plan à s'occuper des enfants, la violence physique accompagne la violence verbale, mais pour autant la rancune n'a pas sa place. Fred, lui, habitué au vol de bagnoles, de BMW en particulier, a au cours de l'histoire, une vision, celle d'un ange, qui va lui faire remettre en cause sa façon de voir la vie et rappelant la forte religiosité des Yéniches. Rarement un film nous permet de découvrir une population voisine (ils seraient 400 000 environ en France) qui nous est inconnue. Bien que limité dans son champ d'action par un enjeu de représentation d'acteurs qui font attention à l'image qui sera donnée d'eux, Jean-Charles Hue offre un film authentique et brut, un peu déstabilisant mais forcément important.