Ne nous y trompons pas: si de nombreux noms coréens figurent au générique du film, Stoker est américain, profondément américain et aussi l'un des films les plus étonnants de ce début d'année.
Stocker commence par un enterrement, celui du père d'India ( Mia Wasikoswka). L'arrivée inattendue du frère du défunt va être le premier événement perturbateur de l'intrigue, jusque là centrée sur l'univers sensoriel et imaginatif d'India. L'oncle Charlie(Matthew Goode) s'installe chez India et sa mère( Nicole Kidman). Commencent alors les complications. Si l'identité de Charlie ne fait pas l'ombre d'un doute, ses motivations sont insoupçonnées.
Le premier quart d'heure du film est un magnifique défilé d'images féériques, montrant India, jeune fille de 18 ans, aux prises avec ses pensées et le monde extérieur. Park Chan Wook change ensuite de braquet. L'ambiance planante fait place à une mise en scène d'une grand maîtrise. Stoker est une succession de véritables tableaux vivants, aux multiples parfums d’Amérique. Amérique du premier paragraphe. On y sent:
Hitchcock , tout d'abord. Impossible de ne pas penser à SHADOW OF A DOUBT (1943). Déjà, un Oncle Charlie débarquait dans la famille, pour entamer une relation plus qu'ambigüe avec sa nièce. La tension est cristallisée...
Hopper ensuite. Le réalisateur use avec justesse et souvent humour des couleurs et cadrages propres aux peintres . Y sont restituées les mêmes atmosphères de huis-clos, d'isolement, virant au lugubre: contrastes rouge-vert; attitude statique des personnages;arrières-plans d'intérieur clairs et discrets.
Si la mise en scène et le filmage audacieux de PCW sont un pur plaisir, ils ne s'expriment jamais au détriment du jeu des acteurs, magnétiques, à la beauté monstrueuse. La flamboyante rousse Nicole Kidman répondant à la jeune brune Mia Wasikowska, en passant par Matthew Goode, à l'élégance aussi fascinante qu’agaçante, tous s'acheminant vers l'horreur d'une famille par comme les autres. Sans oublier la caméra, actrice géniale, virtuose, qui nous offre un bon paquet de plans mémorables: Un générique de début purement hallucinatoire à la gloire des insectes et de mère nature; des scène d'escalier éléctrisantes ( là aussi Hitchcock n'est pas très loin); le coup de la cabine téléphonique aux allures de série B et l'impressionnante collection de chaussures de Mia défilant sous nos yeux.
Beau, virevoltant, envoûtant, STOKER est une peinture, un grand cru...rouge, qui respire cette furieuse envie de sortir de l'ordinaire. Le maître du suspense croyait au "cinéma pur". Il n'est décidément pas le seul.