Le problème est qu'ici on nous agite à tour de bras le réalisme du film. On est donc susceptible d'assimiler ce qui nous est montré comme étant "la" vérité. Et là, c'est dangereux parce que ce n'est pas le cas. Ainsi, le moindre message douteux, caricatural, invraisemblable ou faux, peut facilement être pris pour argent comptant, ce qui a tendance à m'affoler un peu. Voilà donc ce que j'ai à dire : il y a du bon techniquement, mais il y a du mauvais qui laisse un goût mitigé à cause de quelques gros clichés absurdes. Ce film traduit une belle ambition, une envie de se donner les moyens de reproduire du réalisme, mais il n'a pas pu s'empêcher de forcer l'humanisme en tombant dans une dénonciation politiquement correcte douteuse. L'idée d'A l'Ouest, rien de nouveau, était de nous montrer la folie qui attrapait les jeunes soldats qui allaient au feu avec leur expérience. Il n'y avait pas véritablement d'ennemi, hormis le cauchemar de la guerre elle-même que tout le monde subissait, et cette absence d'ennemi réussissait à nous faire comprendre l'absurdité de la guerre et rendre le film pacifiste. Or, cette version 2022 est passé du pacifiste à l'antimilitarisme, où non seulement la guerre est moche, mais l'armée aussi. Pour cela, le film a rajouté un ennemi artificiel : le dirigeant, l'officier. Un manichéisme où s'opposent les petits fantassins du rang aux gros vilains officiers avides de sang et déconnectés des faits et à l'origine, soi-disant, de tous les maux de la guerre... Et ainsi les clichés vont bon train, ces officiers généraux présentés en seigneurs féodaux, traités comme des rois aux château par leurs domestiques, graillant des pâtisseries et du bon vin dans le dos des pauvres prolos souffrant dans les tranchés. L'autre bêtise est d'avoir voulu forcer sur toute l'histoire en dénaturant sa réalité, en l'occurrence en nous illustrant la guerre sur ses tous derniers jours et ses dernières minutes, pour bien nous rappeler à quel point c'est si bête d'y passer à 30 secondes du coup de sifflet final, alors que ce n'est jamais arrivé de la sorte. C'était trop grossier et ça a eu pour effet de me laisser de marbre, j'ai perdu le potentiel immersif du film. Je ne suis pas du genre à taper sur des erreur historiques futiles et quand la puissance et l'émotion reste gagnante, mais dans le cas présent, non, c'était malheureusement trop. Je pourrais des impossibilités historiques souvent relevées comme de nombreux soldats français disposant de lance-flammes (faux), On nous montre la pure guerre des tranchées des années 1916 à début 1918, alors qu'en réalité on était sur la débandade allemande, la guerre de mouvements avec des avancées rapides et violentes, des tranchées sommaires alors qu'on nous montre des tranchées de front stabilisé ; ajoutons notre héros qui garde le même casque troué pendant près d' un an et demie... Un cumul d'erreurs qui a pour effet de m'enlever l'immersion. Je voyais trop l'aspect cinéma fantaisiste, conçu pour nous bourrer le crâne de certaines idées en se basant spécifiquement sur des choses fausses. C'est dommage, car malgré tout ça, j'ai apprécié le soin apporté aux images, aux décors, à la lumière, aux costumes. Le célèbre moment des deux ennemis qui se retrouvent nez à nez dans un trou a été le seul qui m'ait plutôt ému. Les séquences très attendues de pures batailles, n'ont donc pas été à la hauteur de mes espérances. Je n'ai pas tremblé de froid, de stresse, rien. Je pense que la présence continue de la petite musique de fond voulant apporter un effet de gravité, a finalement eu pour effet de rappeler continuellement la dimension spectaculaire et théâtrale du film et m'a soutiré le potentiel immersif du film. A cela s'ajoute quelques défauts au niveau sonore, où l'horreur du bruit ne se fait pas ou peu comprendre. Tout n'est pas non plus à jeter. L'environnement global, le jeu d'acteur, la saleté, les rats, la faim, sont pas mal. Le tout se laisse regarder malgré quelques longueurs et c'est sympa d'avoir un film de guerre sur 14-18.