La relative haute volée esthétique de ce prélude ou "prequel" rend son existence tout à fait pertinente, ne serait-ce parce qu'il donne envie de revoir (ou de découvrir) l'ancien. La toute fin vient épouser, dans une fluide et troublante cohérence, le début du The Thing de 1982 (John Carpenter), dont il rejoint le style (sans en dépasser la force). Le reproche le plus partagé concerne le choix discutable d'avoir intégré, bien que l'apparition reste réduite, l'objet casse-gueule du vaisseau spatial, dans une apparence rabattue (métal, lumières bleues, circonvolutions). Toutefois, son envergure imposante a de quoi impressionner et il donne par ailleurs l'occassion brève, en de courtes scènes stressantes, d'effectuer un crochet dans l'univers d'ALIEN, avec rappels de SUPER 8 (scène de l'impasse) ou STAR WARS (hologrammes). Comment d'ailleurs ne pas espérer que Mary Elisabeth Winstead incarne à l'avenir l'icônique sergent Ripley dans un ultime ALIEN? Alors qu'elle semble a priori banale, cette actrice, parfaite pour le genre, parvient, sans minauderie ni cabotinage, à générer un charisme appréciable; son talent ne demande qu'à s'épanouir encore, plus que dans ce type de rôle limité. Quant à Joel Edgerton, dont je redoutais la présence, son rôle reste à distance et son profil rejoint parfaitement l'ambiance d'ensemble. De même, Ulrich Tomsen (révélé par FESTEN) incarne à merveille l'ambigü docteur Sandler. On trouve sinon pas mal d'acteurs danois ou mineurs mais bien choisis. Les effets spéciaux restent à la hauteur du genre; bien que le scénario aurait permi d'exploiter plus avant les figures de l'horreur (à la manière de SOCIETY), on peut reconnaître à cette oeuvre le mérite de n'en faire aucun usage gratuit, si ce n'est subrepticement lors des séquences du vaisseau. Avec son premier film, le réalisateur Matthijs van Heijningen Jr (ouf!) accouche d'un bel opus qui, contrairement à ce qu'estiment certains avis, ne salope en rien l'héritage de Carpenter. On pourra regretter justement une certaine frilosité dans le traitement des décors et de l'ambiance du groupe, qui rappelle un peu trop celui du film éponyme, sans qu'on puisse lui reprocher de l'avoir calqué. Si ce "The Thing" danois récolte une appréciation globale moindre que son "ex-suite", ce n'est pas tant pour des raisons intrinsèques que pour la timidité des audaces scénaristiques qui auraient pu l'en distinguer davantage... On peut y voir la patte d'Eric Lasserer, co-scénariste du décevant Freddy 2010 et d'un Destination Finale 5 sans grande surprise. En lui-même, le film ne présente pas grande chose de contestable si ce n'est l'absence d'humour. Le tout s'intègre dans une BO discrète, d'une sobriété redoutablement efface (les deux satanées notes du thème d'Ennio Morricone!), revisitée par l'excellent Marco Beltrami.