Après Old Joy, Wendy et Lucy, Kelly Reichardt poursuit son oeuvre, singulière, autour des mêmes thèmes, l'errance, la solitude, une certaine forme de désespérance, ici celles d'un petit groupe perdu dans les grands espaces américains. C'est le genre choisi qui surprend le plus de la part de la réalisatrice. Mais du western, elle ne garde que le lieu d'action et le but, la conquête de l'Ouest. Bref, la plus simple expression. Dans ce film : pas de chevauchée fantastique, pas de règlement de compte, pas de souffle épique. Juste quelques pionniers qui en bavent dans un environnement vide, sec et poussiéreux. Image et son, très soignés, sont au service d'un cinéma-vérité : rendre compte du quotidien d'hommes et de femmes ordinaires, lancés dans un périple qui les dépasse. On est avec eux, on observe leurs gestes, on ressent leur incertitude et leur inquiétude. Le format carré de l'image participe de cette focalisation, limitant la "dilution" de l'action dans les grands espaces. Sur le principe, ce western-road-movie réaliste est à la fois original et intéressant. En pratique, il n'échappe pas aux écueils de son parti pris : longueurs, ennui... D'autant que le minimalisme de Kelly Reichardt se radicalise de film en film : son histoire est particulièrement pauvre en événements dramatiques. Malgré ce dépouillement narratif, la réalisatrice cultive tout de même un mystère, une tension, autour des questions de confiance, de survie. Mais elle les cultive... pour mieux nous laisser en plan. La fin, abrupte et totalement ouverte, distille le vague sentiment d'avoir été entraîné pour rien, presque d'avoir été floué. La sensibilité à l'originalité du projet, à la qualité de la réalisation, disparaît au profit d'une grosse frustration.