Loi des séries : comme pour « La taularde », « La dernière piste » a la même approche avec son point de vue sonore. Comme pour « La taularde », « La dernière piste » est réalisé par une femme. Devrais-je conclure que les femmes sont plus sensibles au réalisme sonore ? La mini caravane composée de trois chariots avance au rythme d’une roue qui grince, de sabots qui martèlent le sol, de pieds qui se traînent, du frottement des robes, du vent qui fait claquer la toile des chariots. La caméra prend son temps. Comme elle prend son temps pour capter les gestes de la vie au quotidien lesquels participent à cette ambiance sonore comme laver une écuelle au bord de la rivière, comme l’installation du campement, comme la collecte des fagots, comme le crépitement du feu, comme les voix étouffées des hommes en conciliabule, inaudibles aux femmes qui s’interrogent. A cela s’ajoutent la fatigue, la crasse que l’on devine sur les visages, les mains. Trois familles placées sous la confiance de leur guide, Meeks, qui paraît tout aussi perdu qu’elles. Et puis, il y a cet indien, seul, qui les observe de loin puis capturé. Entre bienveillance et méfiance, les familles sauvent l’indien d’une mort souhaitée par Meeks, grande gueule et raciste. On est loin des codes classiques du western. Ici, pas de bons contre des bandits, pas de cow-boy contre les indiens, pas de course poursuite. Ce film véhicule une once d’humanité. Je dis once parce que la fin me laisse sur ma faim ; on n’en saura pas davantage car la réalisatrice abandonne le spectateur assez subitement. A nous de nous interroger comme Emily (Michelle Williams) le fait en suivant des yeux l’indien qui prend l’initiative de continuer la route. A nous de penser si la part d’humanité de ces familles déshydratées se poursuivra. Ambiance sonore, film en format carré, « La dernière piste » pourrait être considéré comme un film radical ; c’est plutôt sa fin qui l’est. A voir en V.O malgré tout !