Emma Watson poursuit ici sa carrière post-Harry Potter, après My Week with Marylin dans lequel elle apparaissait en tant que second rôle. Ici, elle se retrouve en tête d’affiche de l’adaptation du livre Pas raccord, orchestrée par l’auteur lui-même (Stephen Chbosky), et ce aux côtés de Logan « Percy Jackson » Lerman. Un petit film indépendant produit par John Malkovich et lauréat de bon nombre de récompenses. Un chef-d’œuvre en vue ?
Sur le papier, Le Monde de Charlie n’a vraiment rien d’extraordinaire. Pire, il sent la chronique adolescente mille fois traitée à plein nez. Il n’y a qu’à voir l’histoire, qui suit le parcours d’un adolescent mal dans sa peau, rejeté par les autres parce qu’il est jugé comme bizarre (renfermé sur lui-même) mais qui va s’épanouir au contact d’un groupe, ce dernier l’accueillant en son sein pour ce qu’il est. Et, cerise sur le gâteau, va tout de suite tomber amoureux de la plus belle fille de la bande, à première vue inaccessible. De plus, le réalisateur-auteur insiste bien sur le côté nostalgique des 80’s de son bouquin, en insistant bien sur l’ambiance musicale du film : tout une playlist de morceaux connus voire mythiques (cela va de David Bowie à The Smiths, en passant par New Order) mais qui ne parlerons pas à tout le monde. Comme si le film (et donc le livre) ne visait qu’une seule cible dans le public, se fichant totalement des autres spectateurs. Oui, Le Monde de Charlie n’avait pas grand-chose d’exceptionnel à présenter. Et pourtant, Stephen Chbosky a su en tirer une comédie dramatique diablement attachante et universelle.
La grande force du film provient de sa distribution, tout simplement lumineuse. Pour cause, le cinéaste a su s’entourer de jeunots du cinéma qui ont bien plus que du charisme : un talent certain. Ce n’était pourtant pas gagner d’avance avec Logan Lerman, connu pour la saga Percy Jackson et qui n’avait pas vraiment convaincu avec sa performance d’éternel absent. Ici, sa prestation de Charlie transcende l’écran, jouant son personnage avec une justesse imparable. Et ce aux côtés d’une Emma Watson pétillante et naturelle. Quant aux seconds rôles, ils n’ont rien à leur envier, notamment Ezra Miller, qui arrive par moment à piquer la vedette au couple principal. Il est juste dommage que le scénario ne mette pas leur personnage respectif bien plus en valeur que cela, ne se préoccupant principalement que de Charlie et de sa romance. En même temps, le film s’intitule Le Monde de Charlie…
C’est bien là le défaut principal du long-métrage : ne pas s’attarder sur ce qui entoure le personnage de Charlie, ce qui concerne principalement les autres personnages. Ils ont beau se montrer importants pour lui, ils donnent pourtant l’impression de faire tapisserie ou bien de permettre au film d’arborer quelques thématiques (l’homosexualité, le respect et l’acceptation de l’autre, la religion dont le bouddhisme) mais de manière anecdotique, comme s’il avait fallu meubler l’ensemble pour avoir une durée de visionnage conséquente. Néanmoins, le film a beau se montrer classique, son écriture n’en reste pas moins travaillée, le long-métrage proposant une sous-intrigue et des faux-semblants sur le passé de Charlie (auquel sa tante n’est pas étrangère) qui titilleront la curiosité du spectateur et lui permettront de s’attacher encore plus au personnage principal. Surtout que Stephen Chbosky se permet d’établir une sorte de parallélisme entre ce protagoniste et sa bien-aimée, rendant leur relation (et donc l’ensemble de l’histoire) plus intéressante qu’une banale idylle mille fois vue dans les autres films de ce genre.
Tout cela Chbosky, le fait avec une très grande simplicité, sans passer par des effets de style ou autres artifices de mise en scène. Le cinéaste-auteur, en réalisant Le Monde de Charlie, n’avait pas pour ambition de livrer un mélo pour faire pleurer les spectateurs. Il voulait dresser le portrait d’une époque. Celle des années 80, par le biais de la bande-originale ? Non, celle du lycée. Cette période qui rimait avec fêtes, découverte du sexe et consommation d’alcool (et parfois de drogue). Durant laquelle les adolescents pouvaient commencer à se sentir adultes en prenant compte des responsabilités de la vie, de leur avenir. Le Monde de Charlie ne se montre donc pas nostalgique par sa BO, qui n’est utilisé ici que pour apporter du charme à quelques séquences magistrales voire poétiques (la scène du tunnel, principalement), mais grâce à sa façon de retranscrire la vie de ces jeunes étudiants, dans lesquels le public s’y reconnaîtra facilement. Et c’est en cela que Le Monde de Charlie se montre universel : il s’adresse à tout le monde !
Pour ses débuts de réalisation, Stephen Chbosky réussit l’exploit d’adapter correctement son propre livre et d’en tirer une chronique adolescente touchante au possible, et ce malgré quelques défauts. Simple, juste et touchant, Le Monde de Charlie saura réveiller le lycéen qui sommeille encore en vous. Et revivre cela avec nostalgie, c’est tout bonnement rafraîchissant !