Pour leur première collaboration sur grand écran, Fabrice Éboué et Thomas Ngijol nous rejouent la carte des Visiteurs. Où deux hommes, issus d’une époque, se retrouvent propulsés par magie dans une autre, qui leur est totalement différente. Est-ce pour cette raison que Case Départ fut assez bien accueilli par la presse, récoltant au passage plus d’un million d’entrées au box-office ? Sans doute, car, en y regardant bien, nous sommes très, très en deçà du film de Jean-Marie Poiré (quoique le 2 et Les Visiteurs en Amérique…).
Mais contrairement aux Visiteurs, nos héros ne sont pas d’une époque ancestrale, atterrissant dans la notre. Plutôt l’inverse ! Où deux demi-frères (l’un tout juste sorti de prison, véritable glandeur et jouant les caïds, l’autre ayant un mode de vie exemplaire mais reniant par-dessus tout ses origines) doivent se rendre à Cuba, au chevet de leur père mourir, qui leur lègue un acte d’affranchissement de leurs ancêtres esclaves. Qu’ils vont déchirés pour exprimer leur déception face à cet héritage, pour être envoyés au XVIIIe siècle. Période où les Noirs comme ils sont étaient considérés comme des animaux pour le plaisir et les besoins des Blancs.
La meilleure comédie n’est pas celle qui, obligatoirement, propose à chaque seconde un gag burlesque. Car ce dernier n’est pas sûr de marcher. Non, pour qu’un film comique titille déjà notre intérêt, c’est dans sa base scénaristique, son histoire. Et en voulant parlent de l’esclavagisme, l’équipe de Case Départ veut nous relancer à la figure cette époque misérable, humainement parlant. Où la plupart des séquences humoristiques qui nous sont ici proposées ne font que raviver notre haine face à l’esclavagisme, via une lecture au second degré (domestique devant rester sur place et écouter les horreurs crachées par ses maîtres au sujet de sa « race », le moindre signe de rébellion est tout de suite maîtrisé au fouet, le « Nègre intelligent » et cultivé est considéré comme une bête de foire mais aussi comme un potentiel danger qu’il faut mater…). Si vous vous arrêtez au premier, vous verrez des moments qui font plutôt mouches pour ce qui est de faire rire (par exemple, le réveil des esclaves : le contremaître sonnant le clairon, se faisant insulter par nos héros, habituellement adeptes de la grasse matinée, et qui vont en payer le prix pour avoir haussé le ton).
Mais bon, voir ces deux nigauds s’empêtrer dans des situations rocambolesques (insulter et menacer leurs maîtres croyant qu’ils vont retourner dans leur époque, alors que non) ou des idées anachroniques réussies (nos héros sur l’estrade de ventes aux esclaves, exposés en public quasiment nus, juste vêtus de… leur boxer !), cela fait rire les premières minutes. Malheureusement pour Case Départ, plus le temps s’écoule et plus les longueurs commencent à se faire sentir.
La faute à un humour qui ne s’envole véritablement jamais, préférant rester au stade de « bonne gaminerie sympa, sans prise de tête ». À toujours rester sur le même pallier humoristique, le film perd en puissance comique et finit par lasser au bout du compte. Et ça, les scénaristes l’ont remarqué, au point que la seconde partie de Case Départ change littéralement de registre. Fini l’humour bon enfant, place au scabreux ! Et là, c’est parti pour des blagues qui ne font même plus sourire, osant aussi bien le n’importe quoi (le chien de la maîtresse qui finit en brochette) que le vulgaire (taillage de pipe, nos héros procédant à la fornication de leurs ancêtres…). Et cela s’appelle une comédie familiale ! Eh ben…
Gros problème également venant des interprètes, notamment Fabrice Éboué et Thomas Ngijol. D’accord, ce sont eux les stars du film. Ils ont le mérite de réaliser (avec Lionel Steketee) et de scénariser (avec Jérôme L’Hotsky), montrant qu’ils ont la main sur l’intégralité du projet. Et qu’ils veulent en livrer une bonne comédie. Mais cela ne les empêche pas de jouer convenablement ! Là, ça surjoue comme ce n’est pas possible (Ngijol en faisant des caisses qu’en il pleure, Éboué dans l’hébétement…). Rendant leur personnage respectif un peu trop souvent tête à claques. Difficile de s’y attacher dans ses conditions !
Case Départ, où le film qui aurait dû ne jamais avancer jusqu’à sa fin, perdant en qualité. Car, il bien faut le reconnaître, si l’annonce du projet laissait envisager une énième comédie française prêt à se vautrer, le début du long-métrage avait de quoi nous clouer le bec, mauvais spectateur que nous sommes ! Mais bon, la raison a rattrapé l’illusion… Et vu quelques gags et le sujet de Case Départ, c’est fort dommage !