J'ai mis un certain temps avant de me décider à finalement voir ce film. Après tout, le cinéma français est souvent politisé, voir le récent "Intouchables" que j'ai trouvé assez insupportable dans son approche sociale. Je pensais voir à peu près la même chose avec Polisse. Pas du tout. Le film fait débat, ne laisse pas insensible - les critiques vont du tout au tout, de l'abject objet filmique au grand film de comédiens déculotté. Je comprends les deux bords, qu'on aime ou pas, car le film transcende le paysage cinématographique français actuel, le cinéma "social" en quelques sortes : il ne laisse pas insensible et pose des questions de fond autant sur la police et le rapport à l'humain qu'en tant qu'objet cinématographique et son rapport à la morale.
Le film est imparfait, bourré de défauts - le personnage de Melissa par exemple, survolé, l'enchaînement des scènes, le tout prend une forme sérialisée (la télévision est un thème subjectivement abordé). Bref, beaucoup de thèmes sont mis à l'oeuvre avec plus ou moins de réussite obstruant ainsi la forme.
Mais Maïwenn réussit quelque chose de très précis dans tout ce bordel de personnages et d'émotions : au delà de toute dimension politique, sociale, ou morale, la réalisatrice en fait une oeuvre sur l'Humain, ce rapport presque indescriptible entre tous les personnages, entre collègues ou lors d'interrogatoires. Quelque chose de désespéré, de très lourd face à ce quotidien très glauque affronté tous les jours, une routine qui ferait craquer n'importe qui, et dont la seule échappatoire c'est le soutien de son collègue, de sa famille, de l'autre : de l'humain, et quand on se l'un des personnages décidé plus ou moins volontairement de s'en affranchir, de l'autre, ça donne la scène finale, hautement symbolique.
Le film n'a pas la prétention d'inculquer quoi que ce soit, il montre tout simplement. Il décrit avec une très grande férocité le bonheur, l'amour, les enfants.
4 sur 5.