Quand s’affiche le générique de fin, c’est une impression étrange qui m’a habité : l’impression d’avoir assisté à un bon film, qui ne m’a jamais largué en route avec ses termes compliqués (contrairement à ce que j’aurais pu craindre), d’avoir assisté à très bon numéro d’acteur mais aussi l’impression d’un film qui n’est pas allé au bout de sa logique, qui s’est arrêté à mi-chemin de la dénonciation du système, qui n’a pas vraiment osé… Le film est rythmé, sans vraiment de temps morts et fort bien scénarisé. A ce titre, certains passages sont très forts, certains dialogues sans langue de bois sonnent fort et sonnent drôlement justes, ils en disent long sur la mentalité et le système de valeurs de ces gens qui semblent tellement déconnectés de la vie réelle qu’ils nous appellent « les vrais gens ». Les personnages ne sont pas vraiment manichéens, ni des parfaits salauds assumant cyniquement leurs actes, ni des idéalistes osant refuser l’inacceptable. Ce sont juste des hommes et des femmes (mais surtout des hommes) qui pensent à eux avant de penser aux autres, à leurs intérêts propres avant de penser à l’intérêt collectif. Ils font quelque chose qu’ils savent pertinemment être mal et ils composent tant bien que mal avec leurs scrupules, ils se cherchent des excuses, se défaussent sur l’autre et le système, sombrent parfois dans le déni aussi… C’est un des points forts du film, je trouve, la vraie complexité des personnages personnifiée par celui qu’interprète (magistralement comme toujours) Kevin Spacey. Il est le plus brillant d’une bande d’acteurs impeccables : Stanley Tucci, Demi Moore, Jeremy Irons, Paul Bettany. Cependant, comme je le disais plus haut, je ne peux pas de départir d‘une impression d’inachevé devant « Margin call », et la fin du film, brutale et complètement décalée n’aide pas ! Peut-être que c’est l’effet « huis clôt sur 24h » qui rends ce film un petit peu étouffant par moment. Peut-être aussi qu’on aimerait en savoir un peu plus sur « l’après », comment cette banque va être jugée (ou pas) par l’Histoire et le pouvoir politique pour avoir fait ce qu’elle a fait. Et puis, parce qu’il s’agit d’un film américain, on ne pouvait sans doute pas espérer plus dans la dénonciation du système, dans la dénonciation d’un système de valeurs aussi, d’un système qui rémunère si bien des gens si inconscients et si cupides.