Aussi talentueux que soit Walter Salles, je ne comprends pas comment il est possible d'adapter sur grand écran une oeuvre littéraire aussi inadaptable que celle de Jack Kerouac. D'ailleurs, ce projet, dont les droits appartiennent à Coppola, a connu plusieurs échecs, on ne peut plus logiques. Comment transposer au cinéma un livre qui a été écrit d'une seule traite (le fameux "mythe Kerouac"), et inscrit dans l'héritage du mouvement surréaliste ?
Walter Salles nous présente alors sa propre vision du roman, avec plus ou moins d'efficacité. 8 ans après son prodigieux "Carnets de voyage", le réalisateur brésilien persiste dans le road-movie. Si la photographie est toujours aussi magnifique et les plans toujours aussi précis, l'histoire manque cruellement d'intérêt. Et c'est justement là qu'on se rend compte à quel point cette adaptation demande beaucoup de courage.
A la fois trop intimiste pour venir nous chercher, et parfois trop élitiste pour capter le plus grand nombre, le spectateur a beaucoup de mal à trouver sa place face à ces personnages "bourgeois-bohème". La durée du film n'aide pas non plus, puisqu'il atteint les 2h20 ; certaines longueurs se font ressentir et il n'est donc pas rare de bailler entre deux plans. Et c'est bien dommage...
Alors bien sûr, "Sur la route" possède des atouts indéniables, le principe du road-movie parvenant sans mal à nous faire voyager, à nous dépayser, au travers de l'Amérique et de son Histoire. Et les acteurs, globalement trop peu connus, jouent très justes et apportent une réelle fraîcheur au long métrage. Même Kristen Stewart me plait de plus en plus, c'est dire si la direction d'acteur a été menée d'une main de maître.
J'insiste une dernière fois, mais certains plans valent le détour et montrent à quel point Salles sait manier sa caméra. Enfin, les dialogues signés Jose Rivera jouissent d'une certaine richesse et la voix off du narrateur parvient à combler certaines carences au niveau de l'histoire. Malgré les atouts de "Sur La Route", c'est malheureusement bien trop peu pour en faire une oeuvre marquante, si bien qu'on l'oublie assez vite après l'avoir vu.
Si le projet semblait compromis d'avance, on a pourtant du mal à blâmer Walter Salles, et on préfère plutôt encourager cet essai fort périlleux, pas franchement réussi, mais pas franchement mauvais non plus. Dans tous les cas, ça ne remet pas en cause tout le bien que je pense de ce réalisateur brésilien, et je suis impatient de découvrir ses prochains films.