Je voulais absolument voir "Super 8" au cinéma et je l'ai manqué (comme ça m'arrive souvent). Mais, voici la chose réparée puisque je viens de me le faire hier soir. Et j'ai été très déçu.
J.J. Abrams, pour son troisième long-métrage, délaisse le scénario premier pour s'atteler au second scénario. Je m'explique. Le premier (des extra-terrestres débarquent sur Terre dans la ville typique de la vieille Amérique : une belle ville ouvrière plantée au milieu de nulle part) fait office de réalisation pour le second (des gamins réalisent un film sur des zombies). En ce sens, Abrams oublie son scénario pour se focaliser sur la réalisation. Et là, nous avons affaire à un déluge d'effets spéciaux certes bien réglés, mais qui ont l'art de rendre invraisemblable l'intrigue. De fait, on décroche, et l'on prend juste du plaisir pour savourer ces aventures au second degré, car le réalisateur n'en est pas à sa première expérience cinématographique (en atteste son premier métrage, "Mission impossible", le troisième du nom, calibré pour être un divertissement sympathique). Après, si l'on inverse les rôles, le second scénario rend hommage au cinéma du premier scénario. Et comme "Super 8" est produit par Spielberg lui-même, nous avons droit à ce cinéma hommage auquel Abrams a vraiment du mal à se détacher. On y voit du "Rencontres du 3ème type" (je n'en ai vu que des extraits), "Les dents de la mer" (pour la non-vision du monstre durant le film qui devrait faire augmenter notre angoisse), mais aussi du "Alien" (sur lequel le monstre se base. De plus, il est même risible, tant on sait quand il va montrer sa tête.), et surtout du "Jurassik park" en pagaille (n'en déplaise à l'attaque du bus).
Sur tous ces points scénaristiques, Abrams s'emmêle ses ficelles, et finalement n'arrive pas à se dégager de ce fameux déjà vu. C'est dommage, d'autant qu'il avait l'air concerné et concentré. Les acteurs font ce qu'ils peuvent pour sauver ce produit spielberguien, même les meilleurs ont du mal à se dépêtrer de ses poupées russes imbriquées une fois dans un sens, et l'autre, dans l'autre (je pense bien sûr à Elle Fanning, la sœur de Dakota, qui a déjà joué aux côtés de Brad Pitt ("Babel") ou pour Coppola ("Twixt")). S'en est d'autant consternant que la fin fait outrageusement penser à "Intelligence artificielle" et "E.T.". Abrams pense Spielberg, et fait du Spielberg, sans y mettre une patte, un engagement à prouver qu'il est un nouveau maître de la science fiction (ses nouveaux "Star Trek" parlent pour lui), et finalement, il nous pond "Super 8", le film événement de l'été 2011, et il oublie d'augurer le genre science-fiction. C'est vraiment dommage, d'autant qu'il avait moyen de mitonner une de ces super mayonnaises, et l'on ressort, avec d'un côté l'huile, et de l'autre, le vinaigre. La sauce n'a pas pris ! Quel comble !! C'est comme ça, et on ne va pas se plaindre, on a pris un malin plaisir à suivre ces aventures abramsiennes (et fugaces dédommagement pour ces effets visuels bien maîtrisés). Merci Monsieur le réalisateur.
Spectateurs, du déjà vu, on peut zapper.