Bien que décrié par une partie du public (en raison, notamment, de son ton très "American Patriot"), "Independence Day" avait su marquer son époque, grâce à ses impressionnantes scènes de destruction massive (loin d’être communes sur grand écran en 1996) et à la qualité de son casting. Ils ont été nombreux, par la suite, à réutiliser les recettes de Roland Emmerich (qui signait là son meilleur film) et à s’y casser les dents. Le retour aux affaires du réalisateur allemand avec la mise en chantier d’une suite, 20 ans après, avait, dès lors, de quoi titiller notre curiosité… même si ses derniers films catastrophes ne plaidaient pas forcément en faveur d’un renouvellement du genre (voir "Le Jour d’Après" et "2012", spectaculaire mais boursouflés et sans âme). Malheureusement, "Independence Day : Resurgence" s’avère rapidement être un rendez-vous manqué et pêche à, à peu près, tous les niveaux possibles ! Le scénario, tout d’abord, est un pâle copié-collé de l’intrigue du premier opus, qui se veut plus ambitieuse (comprendre "plus énorme") mais qui, à trop vouloir faire dans le gigantisme, a oublié de soigner ses enjeux dramatiques et, accessoirement, ses personnages, y compris les illustres anciens. Ainsi, à part Jeff Goldblum qui tire son épingle du jeu avec son élégance et son ironie naturelle, on ne peut que déplorer l’évolution du rôle de Bill Pullman (devenu une sorte de médium hirsute qui joue les Cassandre), de Judd Hirsch (qui enfonce beaucoup trop le clou du père juif) ou encore de Brent Spiner (transformée en savant tendance queer),
sans parler des caméos inutiles de Vivica A. Fox et d’un Robert Loggia momifié
. Quant aux nouveaux, ils viennent encombrer une histoire qui comptait déjà trop de personnages et, faute de temps (ou d’écriture ?), sont cantonnés à de grossières caricatures, avec l’habituel tête brûlée (Liam Hemsworth plaisant à défaut d’être intéressant), le "fils de" écrasé par le poids de son défunt père (transparent Jessie Usher), la fille du Président tellement courageuse (Maika Munroe, mignonne mais sans intérêt), ou encore la scientifique française forcément synonyme de love story (Charlotte Gainsbourg, toute étonnée d’être là). Les personnages sont, donc, aussi fades et attendus que l’histoire… ce qui suscite un grand désintérêt du public pour leur sort. Il faut, d’ailleurs, croire que Emmerich lui-même s’est désintéressé de ses personnages au profit de ses seules séquences de destruction.
En témoigne l’invraisemblable scène de sacrifice de l’ancien Président Whitmore, personnage emblématique du premier opus (ah, le discours du 4 juillet !) qui est honteusement expédiée !
Emmerich n’a pas davantage su doser l’équilibre entre spectacle pyrotechnique et humour, les vannes qu’il tente de balancer tout au long du film étant, la plupart du temps, d’une affligeante lourdeur
(à commencer par les scènes sur le couple de scientifiques gays !)
et ses séquences plus musclées peinant à se démarquer de ce qui se fait au cinéma depuis quelques années (on pense à "Avengers", à "Transformers"…). Le dosage est d’autant plus raté que les dialogues sont d’une incroyable pauvreté et assénées, la plupart du temps, avec un premier degré à faire pâlir. Aucun supplément d’âme ne ressort de cette suite (pas de BO marquante, pas de photo travaillée, pas même de plans iconiques…) qui noie le spectateur sous un torrent d’effets numériques et de réalisation tapageuse. "Independence Day : Resurgence" est, du reste, trop long, ce qui est dû tant à la faiblesse redondante du scénario que de son dernier tiers, qui parait ne jamais finir avec ce baroud d’honneur assez risible de la Reine des envahisseurs (à mi-chemin entre "Aliens" et "Godzilla"). Et, enfin, qu’est ce que c’est que cette histoire
d’entité extraterrestre prétendument supérieurement intelligente et censée sauver les Terriens… mais qui n’est pas capable de faire comprendre ses attentions au point de se faire dégommer par ceux qu’elle est venue aider
! Outre son caractère aberrant d’un point de vue scénaristique, cette intervention vient aggraver l’un des principaux problèmes du film, à savoir son artificialité. En présentant un monde équipé de la technologie alien
(armement high-tech, véhicules volants, colonisation de la Lune…)
, "Independence Day : Resurgence" se donne des airs de film futuriste… ce qui ne correspond absolument pas à la résistance old school du premier opus (qui participait beaucoup à son charme). Trop de personnages, trop peu d’écriture, trop d’artifice… il y a, donc, peu de choses à sauver dans cette suite, qui se regarde, tout de même, comme un bon gros blockbuster décérébré mais qui aurait dû être bien meilleur. On comprend mieux pourquoi Will Smith ne s’y est finalement pas risqué (et c’est peu dire qu’il manque cruellement dans le tableau). Reste Jeff Goldblum et l’imposante arrivée du vaisseau sur Terre… c’est peu !