S’il est vrai que l’Histoire de la Grèce, ses batailles, sa mythologie, représente pour les cinéastes un puits sans fond de possibilités, ce n’est pas toujours lui rendre hommage que de la porter au cinéma, les écarts pris avec la vérité factuelle étant souvent colossaux. Sur le banc des accusés on retrouvera sans surprise l’insoutenable bouse qu’est Le choc des titans, venu en famille avec son frère cadet, la Colère des titans, mais également les Immortels qui mérite légitimement de sombrer dans les abysses de l’oubli. Pour autant, d’autres œuvres plus heureuses viennent contrebalancer ces échecs culturels, à commencer par Jason et les argonautes, Antigone, Alexandre le Grand, Troie ou encore 300 pour ne pas les citer. La question est de savoir si cette suite d’un film plutôt réussi vient s’inscrire dans la première ou la seconde catégorie ?
Il va sans dire que de 300, il ne reste que quelques lambeaux de chaires : d’abord, nous ne sommes plus dans l’Histoire de ces valeureux guerriers Spartiates, bien que pierre angulaire du récit, mais dans celle des non moins pugnaces héros Athéniens dont les exploits se déroulent pour la majeure partie du film avant la bataille des Thermopyles. Ensuite, parce qu’outre le fait que cette préquelle conserve en partie l’identité visuelle et esthétique des 300, par ailleurs très soignée, elle perd ce qui faisait sa force brute : la capacité de réveiller les instincts primaires du spectateur. L’illusion ne fait effet qu’un temps pour totalement s’effacer dans la seconde partie du film, les cris virils des Spartiates ne trouvant plus d’écho, remplacés par l’ingéniosité des Athéniens. Le sous-titre lui, n’est pas volé, nous assistons effectivement à la naissance, sur le sang des martyrs, d’un Empire Grec unifié.
Que les amateurs d’hémoglobine se rassurent, vous en aurez pour votre argent. Le sang gicle littéralement de toute part, d’une tête tranchée, d’un bras arraché, d’une poitrine perforée, les effusions de sang et d’effets spéciaux, là encore vraiment réussis, sont légions. On regrettera simplement l’utilisation excessive, jusqu’à écœurement, du mode slow motion qui vient ralentir une action frénétique pour se concentrer sur un finish move façon Mortal Kombat et qui n’apporte absolument rien. Tout est une affaire de dosage et si dans l’action on peut retenir ce point précis qui pêche, par contre, un équilibre est savamment trouvé point de vue scénaristique entre réalité historique, fond mythologique et support fantastique.
Parlons-en tiens, du scénario : parallèlement à la bataille qui oppose Léonidas à Xerxès sur les plaines des Thermopyles, se joue en mer des combats épiques d’une importance cruciale : Artémisa, traitresse et chasseresse, Grecque d’origine et Perse de cœur, affronte Themistocle, celui-là même qui a gagné sa réputation en décochant une flèche mortelle à Darius, roi de Perse et père de Xerxès. Pour défaire les troupes de la sublime mais non moins cruelle Artemisa, Themistocle va n’avoir de cesse de solliciter Sparte et les compétences légendaires de ses combattants. Un scénario qui reprend les grandes lignes de l’Histoire en se permettant évidemment de grandes libertés sans pour autant travestir, à l’instar de bien d’autres films du genre, la belle et grande histoire de Grèce.
C’est donc dans la deuxième catégorie que 300 : la naissance d’un Empire vient creuser son trou aux côtés de ses pairs, bien qu’étant un cran en dessous de la première itération pour certaines raisons évoquées ci-dessus, celle-ci n’a pas à rougir ni de ses qualités, ni de ses défauts.