4sur5 Tourné très rapidement après Scream et ses performances démentielles au box-office, ce second volet ne se déroule pas dans la petite ville de Woodsboro, mais dans une université, ou Sidney (l'heroine) suit des cours d'arts dramatiques. Scream 2 démarre très fort et entérine le principe de mise en abyme devenu cher à Craven depuis Freddy 7. Il installe le spectateur dans une salle de cinéma ou est diffusée l'adaptation du massacre produit dans le premier Scream, poussant donc à son paroxysme la notion de fiction dans la fiction. C'est aussi l'occasion pour Craven d'adresser un clin-d'oeil mesquin à une certaine ''culture'' répandue dans la jeunesse de l'époque (fin des 90's) et à l'inconséquence des ''fans'' en général, puisque la salle est submergée d'ados attardés adoptant pour l'occasion le masque du tueur (face à un engouement aussi malsain, la montée sur l'estrade offre une vision saisissante et suggère une réalité... glaçante). Par ailleurs, le réalisateur, pour une fois cinéaste (ça ne durera pas), esquinte l'idée que le cinéma d'horreur soit un facteur déterminant chez les ''cinéphiles-meurtriers'' passant à l'acte (sans chercher à nourrir d'autre explication) ; on ne saurait lui donner tort de chercher à couvrir ainsi, avec légèreté qui plus est, ses arrières.
Scream 2 est marqué par une auto-dérision accrue, mais n'en demeure pas moins un exercice de style consciencieux et pleinement abouti, par sa réflexion comme par ses morceaux de bravoures et son atmosphère générale (c'est sur ce dernier aspect que Craven s'est souvent rattrapé ; ici, il est mieux de sa forme à tous les niveaux). L'intrigue est solide(de nouveau – et c'est tout simplement du jamais vu pour un slasher), quoique certains ressorts tiennent, déjà, de l'auto-plagiat (le schéma autour du faux coupable, les doutes à propos du petit ami, certains bonheurs dans leurs malheurs pour quelques personnages-clés, puis bien sûr le gimmick de la gifle à la journaliste). Pour autant, le film est rempli de surprises (le scénario n'épargne pas les protagonistes majeurs – malgré déjà, sans doute, le projet d'un troisième Scream), ses personnages gagnent en profondeur (notamment le flic et la journaliste) ; l'esprit ''fanboys'' qui restreindra l'intérêt des deux volets présents n'est pas encore la raison d'être de la franchise. Les révélations finales (très surprenantes) constituent l'occasion d'un commentaire sur le cinéma d'horreur, sur ses mécanismes bien sûr mais aussi sur l'impact dans l'inconscient collectif de celui-ci, consacrent en beauté l'homme qui est devenu, en trois films, un faiseur et théoricien du cinéma à la fois. Qui l'eût cru en regardant les charmantes mais bien futiles Griffes de la Nuit ?
Ainsi, Scream 2 enfonce le clou et réinvente le slasher, qui en avait bien sévèrement besoin tant le domaine était devenu obsolète. Et dans le néo-slasher, c'est le tueur qui change de film en film, tandis que les héros restent (pour l'essentiel) ; ce tueur ayant toujours la même identité ou apparence de films en films, ses propriétés interchangeables en font en lui-même une réponse ironique aux abus de simplismes du slasher-movie. Cette dérision sera confondue par de nombreuses œuvres postérieures du même courant, comme Destination finale, qui se contenteront, surtout dans le cas de la saga pré-citée, d'aligner les poncifs avec des effets redoutables, mais dans une atmosphère totalement aseptisée, voir désincarnée, ou la caractérisation s'efface derrière l'impératif gore (alors même que DF est peu spectaculaire à ce niveau). A la nonchalance des films de Craven, on substituera l'inertie ; en outre, il n'y aura plus aucun travail de suspense alors que, si la franchise Scream ne provoque guère la terreur, ses deux premiers opus demeurent des films extrêmement tendus. Certaines séquences dans Scream 2 sont assez remarquables de ce point de vue, comme la poursuite avec Gale Weathers (la journaliste), le meurtre de Sarah Michelle Gellar (dont la prestation fera taire les détracteurs de miss Buffy) ou cette scène ou l'héroine se retrouve bloquée dans une voiture avec le tueur inconscient.
Le discours de certains protagonistes sur la piètre qualité des suites au cinéma se voit torpillé de l'intérieur (un comble), ce Scream 2 se révélant largement à la hauteur de son prédécesseur. Au final, nous avons à faire à deux slashers brillants, des modèles du genre (alors même qu'il le remette en question), à mille lieux des Freddy ou Vendredi 13 ; Scream se consacre ainsi comme la meilleure saga dans le domaine depuis Halloween.
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