Ah, "Le Magicien d'Oz" et sa chanson culte de chez culte, "Somewhere over the rainbow". Un bon film pour enfants, à regarder à la télé pendant les vacances de Noël. Mais en 2013, oubliez Dorothy et tous les personnages qui firent le succès du film, le réalisateur Sam Raimi a décidé de vous raconter l'histoire du magicien, son arrivée dans le pays d'Oz et sa rencontre avec les sorcières Théodora, Evanora et Glinda. Après un retour réussi à l'horreur avec "Jusqu'en Enfer" sorti en 2009, le réalisateur américain Sam Raimi, devenu mondialement connu pour avoir réalisé la première trilogie "Spider-Man" (et dans un tout autre registre la trilogie "Evil Dead"), nous revient en 2013 avec cette préquelle au classique de 1939, "Le Magicien d'Oz". Et de magicien il en sera justement question dans ce nouveau film qui revient sur les débuts d'Oscar Diggs (alias Oz), le magicien charlatan du premier film. Vu par le peuple d'Oz comme le grand magicien dont parlait la prophétie, Oscar Diggs va sans vraiment le vouloir se retrouver au milieu d'une aventure extraordinaire. La première chose qui saute aux yeux en découvrant "Le Monde Fantastique d'Oz", c'est sa ressemblance avec "Alice au Pays des Merveilles" de Tim Burton dans son style visuel. Logique vous me direz, c'est le succès de ce dernier qui a déclenché sa mise en production. Par ailleurs on retrouve sur les deux films bon nombre des mêmes techniciens et artistes (dont le talentueux Michael Kutsche qui s'est occupé du design et des costumes des personnages), ainsi que le même producteur, Joe Roth. Mais là ou le premier pêchait par une surdose de décors numériques, "Le Monde Fantastique d'Oz" a réussi à trouver le bon équilibre entre décors réels et décors générés par ordinateur. Le monde d'Oz s'avère ainsi bien plus consistant et réaliste (toute proportions gardées) que le Pays des Merveilles. Le style graphique est parfaitement maîtrisé, mélangeant habilement les célèbres décors du film original (la route de briques jaune, la cité d'émeraudes, etc...) et de nombreux lieux inédits s'imbriquant parfaitement dans l'univers connu de tous. Les personnages numériques comme le singe Finley ou la petite poupée de porcelaine sont également de belles réussites techniques et graphiques, mais aussi scénaristiques car ces deux personnages sont incroyablement touchants et profondément attachants, en plus d'avoir des arcs narratifs très bien exploités et qui donnent de très belles scènes d'émotion. Je dois bien avouer que ce film me rassure quant à l'utilisation des effets spéciaux numériques de nos jours, la preuve que même si on est capable de tout réaliser en 3D, le tout numérique n'est pas toujours la meilleure solution. Au niveau du scénario, "Le Monde Fantastique d'Oz" reste dans le classique pur et dur. Peut-être pour ne pas trop dénoter avec le film original ? Cependant, on ne s'ennuie pas une seule seconde, le rythme est soutenu, l'humour est bien présent et est très réussi sans jamais être lourd, tout comme l'épouvante (dans une bien moindre mesure). La réalisation est très soignée mais peut-être un peu trop impersonnelle (blockbuster oblige), on ne reconnaît pas vraiment la patte de Sam Raimi, hormis sur quelques plans loufoques lorsque la montgolfière entre dans la tornade. Néanmoins, le réalisateur nous offre de splendide scènes d'aventures admirablement filmées, jouant habilement avec la 3D, la couleur et le format de prises de vue entre le monde réel et le monde d'Oz. Le personnage principal, incarné par l'excellent James Franco, n'est pas dénué d'intérêt. Tout d'abord très sûr de lui et égoïste, on a plaisir à le voir évoluer tout au long du film, passant d'un magicien peu inspiré, faible, vantard, escroc, malhonnête, intéressé, dragueur manipulateur et narcissique, bref un vrai anti-héros, à un véritable héros. Les sidekicks ne sont pas en reste, avec au premier plan Finley, le singe trouillard (doublé par Zach Braff en VO) qui accompagnera le magicien durant une bonne partie de son aventure. Oscar Diggs sera également accompagné d'une petite poupée de porcelaine, China Girl, personnage incroyablement attachant et émouvant, dernière survivante de son village anéanti par les sbires de la Méchante Sorcière, à qui il redonnera espoir et qui n'est pas aussi fragile qu'elle veut le faire croire. Mais "Le Monde Fantastique d'Oz" de Sam Raimi constitue à la fois une préquelle du roman de 1900 et un fabuleux hommage au classique du cinéma de 1939. Le réalisateur a, en effet, parfaitement compris toute l'essence de l'univers d'Oz fait de couleurs, de rêves, d'émerveillements et de voyages. Le scénario est ainsi fort simple mais terriblement efficace : toujours bien écrit sans aucune faute de goût par rapport au matériel d'origine ! Si l'histoire met plutôt l'accent sur la seconde chance d'un homme à devenir meilleur, elle n'oublie jamais l’invitation à découvrir un monde extraordinaire (et à ce niveau ce film est réellement magique, féérique, poétique, onirique et immersif). Le film se construit d’ailleurs en apportant, à son gré, les clés et réponses des questionnement antérieurs remontant à l'arrivée de Dorothy au pays d'Oz. Le spectateur découvre donc comment Oscar Diggs devient le Merveilleux Magicien d'Oz ou comment apparaissent les Méchantes Sorcières de l'Est et de l'Ouest. Il s’émerveille également, aux travers de caméos, devant les personnages du livre et du long-métrage de 1939 à commencer par les Munckins ou le Lion Peureux. L’entame du film constitue à ce sujet un bel hommage au classique de L. Frank Baum. Non seulement, "Le Monde Fantastique d'Oz" commence comme lui en noir et blanc mais a également la bonne idée d'introduire tous les personnages principaux dans la réalité afin qu'ils aient un avatar dans le monde merveilleux de sorte que le spectateur s’interroge sans cesse : est-ce un rêve ou une autre réalité ? Si le film de 1939 répondait clairement à la question (c'est un rêve !), celui de 2013 est bien plus flou tout comme le roman d’ailleurs. "Le Monde Fantastique d'Oz" rend, il est vrai, aussi un vibrant hommage au livre de Lyman Frank Baum en y reprenant certains éléments emblématiques comme les fameuses lunettes vertes ou le peuple de porcelaine. Au fil du film, il apparaît comme une évidence que Sam Raimi s'est totalement approprié les codes de cet univers riche qu’est le monde d’Oz, sans jamais en trahir le roman ou la vision magique qu'en avait le public depuis que "Le Magicien d'Oz", le film de 1939 entré depuis dans l’inconscient collectif. En réalité, dans tout le film, seules quelques longueurs sont à déplorer (notamment la préparation du combat final) mais elles ne sont jamais de nature à ôter au film son caractère prenant et grisant. Carton plein en somme : les fans du film, les fans du roman comme les néophytes ont de quoi être satisfaits ! Les fans de Disney, quant à eux, auront avec "Le Monde Fantastique d'Oz" la quintessence du film Disney par excellence : magie, dépaysement et enchantement. Au-delà du respect apporté au matériau d'origine, la réalisation de Sam Raimi est clairement à souligner dans les grandes réussites du film, même par ses plus fervents détracteurs. Elle est imaginative, inventive, grandiose, efficace et finalement belle... Les mouvements de caméra sont tout simplement parfaits. De la première minute de générique de début à la dernière minute du film, le spectateur est impressionné par la beauté des images livrées avec un goût toujours sûr. Un exemple parmi d’autres : l'idée de tourner la partie au Kansas en noir et blanc, déjà excellente en soi, est tournée en 4/3 pour passer ensuite en cinémascope en arrivant au pays d'Oz. Le spectateur gagne alors le double d'images et ressent une sensation d’immersion totale dans le merveilleux pays d'Oz. Même si elle n’est pas nouvelle, d'autres films Disney ayant déjà utilisé cette astuce, ("Frère des Ours" ou "Il Était une Fois"), le résultat fait des merveilles. Mieux encore, la partie du Kansas est filmée à la façon du cinéma d'antan, ce qui lui donne un joli cachet. A la différence d'un film comme "Alice au Pays des Merveilles" de Tim Burton qui utilisait l'imagerie numérique presque à outrance, celui de Sam Raimi utilise, en effet, de nombreux décors en plateau. Seul les fonds et les paysages extérieurs ont recours à l’ordinateur. Le rendu final se fait ainsi plus présent, plus réel, presque palpable, sans parler de la sensation de se rapprocher des décors du classique de 1939, sans leur aspect de carton-pâte, cela va sans dire... Les effets spéciaux sont pour cela tout simplement magnifiques que cela soit pour les paysages, les batailles ou certaines créatures imaginaires. Côté casting, "Le Monde Fantastique d'Oz" possède des personnages fort sympathiques y compris parmi les secondaires. Dans ce constat, James Franco assume donc le rôle principal d’Oscar Diggs, un magicien sans envergure qui possède, dans le monde réel, un cirque itinérant dans le Kansas. Séduisant et charmeur, il est un homme à la moralité douteuse, vrai charlatan qui captive les foules et qui s'extirpe de tous les problèmes par son indéniable bagout. Transporté au pays d'Oz, il y voit une occasion de repartir de zéro même si les vieilles habitudes ont décidément la vie dure. L’acteur renoue ici avec le réalisateur puisqu’il a déjà travaillé sous les ordres de Sam Raimi sur la trilogie "Spider-Man". De même, il avait déjà signé par le passé sous le giron de The Walt Disney Company puisque le Touchstone Pictures, Annapolis se retrouve également dans sa filmographie. James Franco livre ici une prestation en accord parfait avec son personnage le rendant intéressé, cupide tout en renvoyant un joli fond de bonté. Il répare, en fait chez Oz et à sa façon, les mauvaises actions commises dans la réalité, et qui, mine de rien, le culpabilisent vraiment. Mila Kunis joue, elle, la belle sorcière Théodora. Douce et naïve, protégée par sa puissante sœur Evanora, elle espère voir la paix régner sur le pays d'Oz. Elle est ainsi convaincue que le Magicien apportera l'harmonie comme l'annonce la prophétie. La candeur naturelle de l’actrice participe beaucoup à la réussite du personnage. Elle est un personnage très intéressant car elle n'est pas mauvaise de base mais elle le devient à cause de son cœur brisé et de la manipulation de sa sœur, pour devenir la Méchante Sorcière de l'Ouest. C'est ainsi un personnage d'antagoniste qui a une profondeur bienvenue et qui suscite l'émotion et la compassion. La sorcière Evanora est la souveraine par intérim du Pays d'Oz dans l'attente du Magicien qu'annonce la prophétie. Elle fait de son mieux pour protéger aussi bien le royaume que sa sœur, en proie à tous les dangers du fait de sa trop grande naïveté, mais c'est en réalité la Méchante Sorcière qui manipule tout son monde. La belle Rachel Weisz prête ainsi sa prestance à ce personnage toute en tenue et en classe. Glinda est la bonne sorcière qui règne sur le paisible Royaume du Sud, terre du peuple simple et d'une grande gentillesse, les Quadlings. Bienveillante et emplie de compassion, elle est aussi une ardente protectrice de son peuple. Même si elle n'est pas dupe du jeu d'Oscar, elle sait qu'au fond de lui se cache quelque chose de bon. Campée par une ravissante et convaincante Michelle Williams, le personnage affiche une sublime grâce. Zack Braff, connu principalement pour son rôle principal dans la série ABC Studios, "Scrubs : Toubib Or Not Toubib !", endosse Frank, l'assistant d'Oscar au Kansas. Ce dernier est celui qui s'occupe des questions d'argent, répare les costumes et gère les accessoires. Complètement exploité, il n'est en réalité pas apprécié à sa juste valeur. Dans le film, l'acteur prêtre également sa voix au personnage de Finley, le singe volant qui accompagne Oscar au cours de son voyage dans le pays d’Oz. N'ayant à la base pas une haute opinion du charlatan, il va pourtant en devenir son plus fidèle allié. Zack Braff fait ici des merveilles en portant sur ses épaules tout l’humour de ses personnages, assurément les des plus drôles du long-métrage. Finley est notamment le symbole d’une caractéristique surprenante du film : sa drôlerie, toujours bien amenée et rendant l’ensemble particulièrement attrayant. La fille de porcelaine, China Girl, est un autre personnage adorable. Guérie par le magicien, elle va se prendre d'affection pour lui et lui vouer une admiration sans bornes. Entièrement réalisée en images de synthèse, elle est incroyable de réalisme : le spectateur a vraiment l'impression de voir une poupée de porcelaine s’animer sous ses yeux. Sa voix est prêtée par la jeune actrice Joey King qui apparaît également, en chair et en os, quelques minutes en début du film. Enfin, restent à souligner à la volée d'autres personnages, certes secondaires mais fort sympathiques, comme Knuck, le Munchkin grincheux joué par Tony Cox ou le Maître Tinker, interprété par Bill Cobbs. Au niveau visuel, les décors sont vraiment magnifiques, fantastiques, colorés, riches, détaillés, avec des couleurs chaudes très pétantes rendant l'univers du film très coloré, très beau visuellement mais aussi très kitsch, mais vraiment très fouillé, poétique, magique et féérique. Sur le plan musical, la bande originale du film est signée de Danny Elfman. Sa participation au film peut étonner dans la mesure où il n’avait plus travaillé avec Sam Raimi depuis leur brouille remontant à "Spider-Man 2". La fâcherie n’a visiblement pas entamé son enthousiasme à servir le réalisateur : Danny Elfman livre, en effet, une partition merveilleuse, magique, grandiose et épique. Parfaite pour le thème, elle offre même un joli clin d'œil au classique du cinéma de 1939, via une chanson avortée des Munchkins. A noter, également, Maria Carey qui s’invite au générique en interprétant le titre "Almost Home".
"Le Monde Fantastique d'Oz" est un merveilleux voyage ! Sam Raimi propose à la fois un vibrant hommage au roman de 1900 et au film de 1939, mais aussi un vibrant hommage au cinéma grâce à la réalisation d'une grande efficacité et à la maestria que constitue le combat final du film, tout en grandiose et en immersif, tout en signant une œuvre personnelle accessible aux plus néophytes du pays d'Oz. Il donne surtout une leçon magistrale de réalisation intervenant sur les moindres détails y compris dans les génériques de début et de fin. Sa mise en scène est magique, imaginative, dépaysante et inventive. Sam Raimi réussit donc le tour de force de livrer le film Disney par excellence prompte à faire rêver le spectateur en l’amenant visiter des lieux improbables, rencontrer des personnages attachants et même rire avec intelligence. Le film nous propose une invitation au rêve et au voyage mais aussi des séquences d'action bien pensées, des moments de bravoure très efficaces mais aussi des moments touchants très réussis, où la magie opère et où le cynisme n'a pas sa place. "Le Monde Fantastique d'Oz" est donc surtout une belle réussite graphique et un vibrant hommage au film original de 1939. Cependant, en raison de son trop grand classicisme dans son scénario et son manque de surprise, le film loupe la marche qui l'aurait mené vers un film Disney inoubliable. Enfin, le casting a beau être de qualité, on aurait aimé voir les acteurs nous offrir un peu plus de fantaisie, mais on a tout de même une très belle brochette d'acteurs et d'actrices au top (James Franco, Zach Braff, Michelle Wiliams, Rachel Weisz, Mila Kunis... Mais ne boudons pas notre plaisir, on passe tout de même un très bon moment devant cette nouvelle production Disney au charme à la fois désuet et extrêmement moderne. Retour à Oz réussi ! Le public doit aller voir ce film comme il va voir un spectacle de cirque moderne, pour en prendre plein la vue et s’émerveiller tout du long ! Il n’y à plus à attendre : il faut emprunter sans tarder la route de brique jaune pour aller visiter ce merveilleux, fantastique et magique conte de fées qu'est "Le Monde Fantastique d'Oz" ! Un très bon film Disney à voir !