"Cela formera pour vous des franges, vous les regarderez et vous vous rappellerez tous les commandements de l'Éternel, afin que vous les exécutiez et ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux, qui vous entraînent à l'infidélité." Superbe noir et blanc, porté par deux comédiens magnifiques, on retrouve Sylvain, Lolita, et surtout Arthur. On va au théâtre, enfin presque, vu qu'on est dans une salle de projection plongée dans le noir, devant une toile blanche tendue. Alors pendant que les personnages vont au théâtre, on traine dans le quartier. A la différence des cinélâtres qui tournent ou seulement parlent du cinéma, Louis Garrel ne s'illusionne pas une seconde sur la toute puissance du cinéma, tout ça reste à sa place : à la porte du théâtre, du lieu et du temps authentiquement vécu, irreprésentable, ou si mal, qui plus est intimement lié au verbe, au texte, à l'absolue liberté de pensée, de mouvement, des êtres, des corps. Bref, il ne confond pas réel et réalité. Ce qui donne un bel effet de mise en scène, intelligent et léger. Du coup on n'est pas là quand Marie-Julie sourit à Arthur. Arthur va devoir choisir entre l'amour fou qui perd la raison et son artisanat, art talmudique d'Albert, qui l'a élu, avec toute la tradition, la chaine de transmission que cela implique - on prend les mesures directement à même le corps des amants, parfois on se pique - sacerdoce. Les copains de Louis Garrel sont encore plus beaux - Léa Seydoux n'a jamais été aussi sublime, aussi bien filmée, on est tout bonnement pantelant, très bêtes, comme tous les garçons. Arthur IGUAL exceptionnellement beau, et doué - les SMITHS et la musique de Grégoire HETZEL - Louis GARREL comprend que le choix ne se situe pas entre Bien et Mal, mais entre la vie ou la mort, la vérité et le faux, le mensonge ; il sera donc un grand cinéaste. "Très fidèle à mes amitiés / Dans un bleu reflet qui s'argente / Sous un, si vous en doutiez ! / Que ma robe seule est changeante." Stéphane MALLARME