Deuxième long-métrage après Steak pour l'artiste electro Quentin Dupieux, plus connu sous le pseudonyme de Mr Oizo. Cette fois-ci, l'apprenti réalisateur français part tourner dans le désert californien avec pour seul équipement deux appareils photos haute définition (le fameux Canon EOS 5D Mark II) et une petite équipe de techniciens prêts à le suivre dans sa nouvelle folie visuelle. L'image est d'ailleurs impeccable, reflétant à merveille les lumières chaudes de la Californie, la poussière de son désert et les rayons de son soleil éclatant. Puis vient cette histoire de pneu tueur aux pouvoirs télékinésiques qui va commettre une virée sanglante, faisant exploser tout ce qu'il trouve, humain ou non. Mais en plus de filmer une telle bizarrerie, Dupieux va nous plonger dans une intrigue beaucoup plus monstrueuse, beaucoup plus étrange et énigmatique : cette histoire (dite "réelle") de pneu vivant est contemplée par des téléspectateurs fictifs, regardant du haut d'une colline asséchée ce scénario apparemment inventé de toute pièce par quelqu'un d'inconnu, d'invisible, quelqu'un que l'on appelle "Maître", qui a des assistants et tout le tralala... Et tandis que les spectateurs suivent cet étrange long-métrage en direct, nous les regardons s'y passionner, comme une mise en abîme dans une mise en abîme. Fortiche le Dupieux ! Les dialogues sont le plus souvent dingue, à l'instar de plusieurs scènes trash et de situations aussi grotesques que fantastiques, à commencer par la fascination du pneu pour Sheila (campée par une Roxane Mesquida comme à son habitude monolithique). Sans dévoiler cette histoire folle peuplée de personnages étranges, de sobres décors magnifiques et d'une vision contemplative, le film nous immerge dans le non-sens le plus abouti. Au final, Rubber peut dérouter, dégoûter ou encore même ennuyer mais ne peut laisser concrètement indifférent, Quentin Dupieux nous livrant ici un OFNI des plus intrigants, allant comme le dit le personnage du Lieutenant Chad dans le "aucune raison", sans aucune justification quant à son histoire fantastique, son but ou ses scènes le plus souvent incompréhensibles. Puisant sa force dans son absurde et sa narration unique, ce second long-métrage nous prouve que son metteur en scène, outre ses talents musicaux, a un brillant avenir dans l'univers du cinéma indépendant, les idées fourmillant dans sa tête étant fabuleusement jouissives. Un réalisateur à suivre donc...