Louise Wimmer, c'est le nom de cette femme de 50 ans que la caméra de Cyril Menneguin (documentariste qui s'essaie pour la première fois à la fiction) va coller aux basques pendant une heure et vingt. On ne saura pas grand chose de sa vie d'avant, les informations nous sont données tardivement, et au compte goutte, on devine juste que ses ennuis ont commencé suite à une rupture avec le père de sa fille d'une vingtaine d'années, et que celle ci fait tout pour éviter sa mère, certainement honteuse de voir cette dernière flirter trés dangereusement avec la marginalité. Car Louise Wimmer est totalement ce que l'opinion publique a appellé depuis une dizaine d'années "un travailleuse pauvre", cette catégorie de gens qui ont un revenu, mais pas assez suffisant pour s'en sortir financièrement. Les ménages que fait Louise dans un hôtel médiocre et chez quelques particuliers ne lui permettent pas de trouver un logement, et elle est donc obligée d'aller dormir dans sa voiture toutes les nuits. Sa voiture est son seul véritable allié, et on se sent à trembler pour elle lorsqu'elle son auto donne de sérieux signes de faiblesses.
Vous l'aurez compris, j'ai trouvé que "Louise Wimmer"est un très beau film à l'image de son héroîne, apre, aride, maisfilm-louise-wimmer-en-streaming_4lig9_1vr8sp digne et intègre. Moi qui cotoie régulièrement des profils similaires, je dois reconnaitre que le trait n'est absolument pas forcé et que toutes les scènes sont d'une justesse épatante. Alors, comme je le disais dans ma critique sur Une Vie Meilleure, ce film renvoie au visage une réalité si dure que tout le monde n'a pas forcément envie de le voir dans les salles obscures, et par rapport au film de Cédric Kahn ce film est sans doute moins accessible car plus radical dans sa forme et le fond ( avec très-trop?- peu de rebondissements, mais là n'était pas le propos du cinéaste) et une absence de tête d'affiche comme Guillaume Canet peut l'être.
Cela dit, on a déja lu ici et là l'énorme performance de Corinne Masiero (une actrice que je ne connaissais pas du tout, alors même que je me vante de connaitre tous les 3ème et 4ème rôles du cinéma français), mais il faut le redire une fois de plus tant elle incarne cette Louise Wimmer avec une force et une véracité incroyable.
Les autres acteurs, même ceux qui passent deux secondes à l'écran sont aussi criants de vérité, ce qui n'est pas toujours le cas dans ce genre de cinéma. Cyril Menneguin a visiblement voulu faire un cinéma ultraréaliste à la manière des frères Dardenne, et personnellement, j'y ai trouvé plus d'émotions que dans la plupart des films des frères bi palmés, notamment lors de la scène où Louise retrouve sa fille, scène bouleversante dans les non dits et l'humiliation qu'elle recèle.
Bref, Louise Wimmer, qu'on quitte à la fin du film avec une petite lueur d'espoir (la toute première) est un de ces êtres qu'on est trés heureux d'avoir découvert et on remercie le jeune cinéma français d'oser s'aventurer sur ces contrées pour nous proposer de si beaux portraits de femmes, comme le cinéma anglais nous le proposait il y a une ou deux décennies (le film fait beaucoup penser au Ladybird de Ken Loach).