Louise Wimmer n'est pas une personne qui attire la sympathie. Presque 50 ans, plus d'appartement, un job de femme de ménage, elle dort dans une vieille Volvo break et se débrouille comme elle peut. Prendre le plateau repas d'une cliente qui s'en va, dans une cafétéria, pour se servir au buffet à volonté, syphonner les réservoirs des poids lourds, prendre sa douche dans une station service : elle use de tous les expédients qui la maintienne dans une condition de presque SDF.
Et si j'ai commencé cette critique par dire qu'elle n'est pas aimable, c'est parce que Louise est revêche, peu conciliante, et qu'elle parait même vaniteuse (refuser les avances d'un ami sincèrement épris, décliner les offres d'aide d'un amant de passage, s'inventer un domicile lors des démarches sociales, par fierté).
Louise Wimmer n'est pas un film aimable. Il ne s'y passe pas grand-chose, la mise en scène est sage et paraît peu exigeante. Cyril Mennegun explore des lieux tristes et peu séduisants : parking de gare, rue quelconque, station service, hôtel de passage, bar PMU. Autant de non-lieux issus d'une mythologie urbaine cafardeuse. Le film traîne une nonchalance studieuse et un peu rêveuse, que certains qualifieront de minimalisme.
On s'attend à plusieurs moments à un coup du sort, un accident de voiture, une agression nocturne, mais le film ne nous propose que des personnes attentionnées (le prêteur sur gage, la tenancière du PMU, l'ami, l'assistante sociale) ou de médiocres méchants (le patron de l'hôtel). Il ne nous éclaire pas plus sur le passé de Louise. L'espoir du film, sans cesse recommencé, semble consister à tenter de capter toutes les variations possibles des sentiments sur le visage et le corps de son (exceptionnelle) actrice. Jouissance, tristesse, désespoir, bonheur, colère, dédain, honte, espoir. Programme minimaliste, temps de crise, ambition blafarde.
Louise Wimmer et Louise Wimmer ne sont pas aimables.
Et pourtant on les aime tous deux : elle, le personnage, qui rayonne comme la force brute de la vie et lui, le film, qui donne l'impression de voir la crise au cinéma ... pour la première fois.
A voir absolument. D'autres articles sur Christoblog : http://chris666blogsallocinefr.over-blog.com/