A l'image de David Fincher et son "Social Network", Florent Emiliori Siri propose une oeuvre puissante, en décalage narratif avec son protagoniste, et embarque le spectateur dans une histoire qui a moins l'air d'un biopic qu'une grande aventure. Aimer ou non Claude Francois n'est finalement pas l'argument de base pour justifier l'envie de voir ce film. C'est la maitrise de la réalisation (les apparitions de Claude sur scéne sont excellentes), de la photographie (malgré une image granuleuse), mais surtout, un sens du rythme et de la direction artistique. Jeremy Renier, comme son personnage, ne laisse rien au hasard et offre aux spectateurs (fans ou non) une performance confondante de réalisme. Bien épaulé par les apparitions, entre autres, de Benoit Magimel qui campe un Paul Lederman interessant. De l'Egypte à la France, en passant par l'Angleterre, vous suivrez le parcours inattendu de l'icone d'une generation. Aussi ambitieux soit-il, "Cloclo" bascule (une seule fois) dans l'émotion provoquée, sorte d'accentuation dramatique que j'aurai préféré ne pas voir tant le film est magnifique. C'est donc quitte ou double. Si vous aimiez Cloclo mais ne connaissiez pas tout de sa vie, vous risquez fort d'être frappés au visage par la folie du personnage. Paranoïaque, lunatique, maniaque obsessionnel, égocentrique, narcissique, autoritaire, bref un homme qui se questionne sur ses echecs sentimentaux sans prendre de recul sur sa propre existence. Une existence qui, il faut bien l'avouer, n'a pas toujours été tendre avec lui. Vivant son adolescence aux cotés d'un pére absent ou juste là, la plupart du temps, pour dicter ses ordres et imposer la voie à suivre pour ses enfants ; tentant de convaincre les grands patrons, via des contacts pas forcément inspirants en premier lieu, de lui donner sa chance pour la sortie d'un tube quitte à ce que cela devienne une quête obsessionnelle ; puis bien sur, concillier son succés naissant (ou encore ombragé) avec ses amoures, en leur faisant vivre un calvaire médusant au regard de l'image que ce grand artiste polyvalent renvoie. Pour ceux qui n'aiment pas à la base (comme moi), cela réconforte le jugement. Avec tous ces défauts, qui plus est son "imposture" dans le milieu (ba en même temps il le dit lui-même : voix de cannard, petit etc...), Cloclo ne regresse néanmoins pas dans l'estime. En outre, Siri lui confére une sensibilité qui interpelle et nous conduit inévitablement à le prendre en compassion. Car, en digne "malaimé", Claude Francois a construit son image autour de principes qui dépassent l'entendement, vivant dans l'ombre de son enfance, enviant le succés d'artistes tels que Johnny Hallyday, et avoir été maintes fois éconduit pour finalement briller sur scéne, il n'inspire que la haine par la façon dont il traite ceux qui ont fait qu'il est celui qu'il est et qui, aujourd'hui, restera celui qu'il a été dans le coeur de ceux qui y étaient.