En ‘48, Orwell livrait sa vision désœuvrée de 1984 : une année parfaitement adaptée pour porter l’histoire à l’écran. C’est Michael Radford qui s’y colle, et profitez-en, vous ne le reverrez pas souvent. Visiblement connaisseur, il n’adresse son interprétation qu’à ses pairs – alors pour l’équilibre des chances, voici quelques indications. Frange d’un monde ruiné par les guerres, Océania est régie par l’Angsoc, un parti national-socialiste écrasant qui joue des conflits pour manier les foules, leur proscrivant l’amour et les rivant à des emplois décérébrés. La société se scinde en trois : les chefs du Parti intérieur, la fange du prolétariat et au milieu, la masse au Parti extérieur. C’est là que travaille Winston Smith au nom du Miniver, le Ministère de la vérité, autrement dit le département de la propagande. L’ère est à l’avilissement soumis, au conservatisme grégaire, au règne de la surveillance et de la délation. Lui, son job, c’est réécrire l’histoire, en éditant les nouvelles en boucle sur les télécrans, cette invention ultime de l’abrutissement tout-puissant, qui épie, harangue et vante les succès chimériques de la patrie. Mais il tombe amoureux, et dès lors on ne l’accepte plus. Si c’est moins le film que le livre qui permet d’apprécier les rouages de cette sinistre vision, on retiendra tout de même un excellent John Hurt, et l’atmosphère glacée qu’apportent les plans fixes et la bande-son électro du tandem Eurythmics. Mais clairement tout ça est très lent, un peu halluciné et surtout, bien trop exigeant.