Fut un temps je n’aurai pas aimé ce genre de film, mais là je le sentais bien, une diffusion sur Arte, une longueur appréciable (1h30), pas d’action (donc pas fatiguant), du fond, idéal pour passer une bonne soirée. Et 17 filles s’est avéré à la hauteur de mes attentes.
Ce qu’on retient, tout d’abord c’est le discours. Même si le postulat de départ peut choquer, 17 filles qui tombent enceinte en même temps, voire paraitre absurde, il ne faut pas oublier qu’il y a une histoire vraie là-dessous, et qu’en plus le film se permet de répondre parfaitement à la question du « pourquoi ces filles font ça ? ». Ainsi, le film mêle admirablement bien, pauvreté, désœuvrement, avenir perdu, sexualité, féminisme, maternité et adolescence. Tous ces thèmes sont liés pour apporter une vraie profondeur au film :
Si ces filles font ce geste, c’est car elles n’entrevoient pas d’avenir, avec des parents « pauvres », elles habitent dans une ancienne cité ouvrière et sont désœuvrées. Pour s’occuper mais aussi donner un sens à leur vie, elles décident collectivement d’avoir un avenir, et cet avenir c’est d’avoir un enfant. Les garçons sont renvoyés à leur fonction première, la fécondation, et les filles décident qu’elles peuvent faire ce qu’elles veulent de leur corps. Et l’adolescence vient par-dessus, avec les doutes des filles et leur insouciance, leur désir de vivre toutes ensembles plus tard (utopie de l’amitié et de la jeunesse).
Je suis le premier à penser qu’il est inconscient de faire un enfant à 17 ans, mais là j’y ai cru, et j’étais de leur côté, parce que c’est très bien justifié.
En plus le film est hyper bien écrit, j’ai en tête notamment la scène du conseil de classe entre profs, où chacun y va de sa petite phrase sur le geste des étudiantes, et chaque phrase est juste, même si les avis des profs sont bien différents, chaque phrase donne un sens au film. Je n’ai pas senti une ligne de dialogue qui soit clichée ou surjouée, tout colle en fait.
J’ai adoré aussi la réalisation, la façon qu’on les réalisatrices d’illustrer le propos du film, en filmant les quartiers pauvres de Lorient, à travers une scène très simple par exemple, celle du tourniquet, où le dialogue des filles sur leur désœuvrement se ressent sur l’arrière-plan, montrant une ville vide.
Vraiment j’ai été touché par ce film, son propos et sa façon de mettre en scène la pauvreté, sans en faire des tonnes, juste en montrant Camille dans son appartement, ou en faisant un plan sur un immeuble, c’est bref et pourtant on comprend tout de suite. Idem sur la maternité des 17 filles, le film joue très bien entre la logique de ce geste, que l’on comprend, mais aussi le fait qu’elles restent des adolescentes et sont donc insouciantes.
Et puis c’est rare de voir un film avec un propos si féministe (et bien différent de d’habitude). Ces filles ont décidé de s’approprier leur corps, elles se servent des garçons comme d’objets sexuels pour arriver à leur but, on écarte complètement la question de la paternité. Ça peut choquer mais qu’un film montre ça c’est bien, car effectivement on peut faire ce que l’on veut de son corps. Et effectivement les femmes sont faites pour enfanter et les hommes pour féconder l’ovule, c’est la nature, on ne peut faire autrement et c’est la force du film de montrer ça, de nous le rappeler, et c’est très féministe justement, bien plus que le discours sur l’égalité des sexes.
Si j’ai un reproche à formuler c’est peut-être sur la fin, très (trop ?) abrupte, mais finalement elle est nécessaire, elle nous ramène à la réalité, même si le geste de ces filles était justifié, cela reste une utopie d’adolescente. On voulait y croire, comme elles, mais l’on savait depuis le début que ce n’était pas possible.