La suite de l’excellent "Kick-Ass"… sans l’excellent Matthew Vaughn aux manettes ! C’est sans doute ce qui fait toute la différence entre les deux films et qui explique l’incontestable baisse de niveau de ce second épisode. Car, plus que la disparition de l’effet de surprise (inhérente à toute suite), c’est bien la mise en scène du quasi-inconnu Jeff Wadlow qui pose problème ou, plutôt, qui ne supporte pas la comparaison avec son illustre aîné. Le spectateur un brin vigilant se rendra vite compte que le réalisateur se contente de marcher dans les pas de Vaughn en gonflant ses scènes d’action à coups de montage survitaminé, en exploitant une BO similaire et conservant le ton décalé des personnages… ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose et confère à la saga une certaine cohérence formelle. Par contre, Wadlow n’a visiblement pas le talent de son prédécesseur en matière de storytelling et de traitement des personnages. En effet, l’intrigue de ce" Kick-Ass 2" n’évoque pas tant les rêves de super-héros d’adolescents immature (ce qui était le cas du premier film) que les milices et autre "vigilantes" typiquement américains… avec toute l’ambiguïté morale que suppose de tels groupements. Certes, on pourrait estimer que la frontière est mince avec les super-héros de comics books mais, là où le premier épisode se plaçait dans une logique iconoclaste (Kick-Ass évoquait Spider-Man, Big Daddy était un ersatz de Batman, Red Mist avait sa propre "Batmobile"…), Wadlow privilégie une approche bien plus réaliste et urbaine… ce qui fait perdre beaucoup d’innocence à la saga et, par la même, beaucoup de fun. Et ce n’est pas la radicalisation des positions de chacun des personnages ou l’explosion du nombre de morts qui vient arranger la chose. Je me demande même si le principal problème de ce "Kick-Ass 2" ne réside pas dans la légèreté avec laquelle il traite la violence. Certes, le comics d’origine est d’une violence outrancière que le premier opus avait considérablement adoucie. En cela, cette suite, beaucoup plus frontale, est davantage en phase avec son modèle papier et induit même une réflexion sur la responsabilité des super-héros quant à l’apparition de super-vilains. Pour autant, difficile de ne pas être gêné par la gratuité, voire la légitimation de ce déchaînement de violence qui n’est ni désamorcé par un second degré qui aurait pourtant fait du bien (malgré quelques tentatives souvent maladroites), ni transcendé par d’éventuelles réactions épidermiques des personnages. Comment imaginer que le "traître" Todd ne soit pas rongé par le remord après avoir balancé la véritable identité de son pote au méchant ou encore que Kick-Ass ne soit pas dévasté par la mort de son père, surtout au vu de sa propre responsabilité ? A ce titre, le personnage de Kick-Ass (toujours campé par Aaron Taylor-Johnson) ne pourra que décevoir par son inertie et son manque de consistance, surtout au vu des événements qu’il traverse. On en vient même à se désintéresser de son sort, surtout face aux deux personnages véritablement centraux du film, à savoir la terrible Hit-Girl (campé par l’extraordinaire Chloe Moretz), qui reste la principale attraction malgré le vieillissement du personnage (et donc un décalage amoindri), et le pathétique Mother Fucker (interprété par un Christopher Mintz-Plasse habité) qui, sous ses airs de benêt irresponsable, s’avère être d’une grande complexité. Ses deux personnages s’emparent des meilleures scènes (Hit-Girl qui tente de devenir une ado normale, Mother Fucker qui fait l’apprentissage de la vie de riche orphelin ou qui rend visite à son oncle en prison…) et des meilleurs dialogues. Plus surprenant, le rôle de Jim Carrey, annoncé comme une des interprétations les plus déjantées de l’acteur, s’avère assez anecdotique et disparaît bien trop vite de l’intrigue. Dans l’ensemble, et malgré ses défauts, ce "Kick-Ass 2" reste un divertissement tout à fait regardable et ce d’autant qu’il conserve le ton décalé et l’énergie du premier opus. Dommage cependant que Matthew Vaughn n’ait pas été en charge de cette suite.