Adaptation lointaine du roman éponyme de Douglas Kennedy, La Femme du Vème, signé du réalisateur polonais Pawel Pawlikowski, est un film étrange, énigmatique, qui sème le trouble chez le spectateur. Trouble comme la vision très myope de Tom Ricks, romancier américain, auteur d’un seul livre, qui débarque à Paris pour renouer avec sa fille qui vit désormais chez sa mère. Troubles aussi comme les images floues d’un Paris inhabituel, qui n’est pas sans rappeler les capitales de l’Est : Budapest ou Prague. Troubles enfin comme les différents personnages que va côtoyer le mystérieux écrivain dont le film épouse le point de vue en permanence. Des personnages qui ont en commun d’être tous des étrangers : de l’hôtelier turc et sa serveuse polonaise, à la tête d’un établissement miteux où Tom trouve refuge, occupé notamment par un Noir violent et peu coopératif, à Margit, la femme sensuelle et secrète, d’origine roumaine que Tom rencontre – ou pense, peut-être, rencontrer – à une rencontre littéraire.
Employé par le patron de l’hôtel à des surveillances nocturnes, Tom est à la fois l’acteur et le spectateur d’un enchainement d’événements inexplicables dont on ignore s’il en est l’investigateur ou la victime. Pour être touché par La Femme du Vème, il faut accepter l’incohérent et l’inexpliqué et se laisser porter par des scènes tour à tour magiques et oniriques (les face-à-face avec Margit, séduisante et prédatrice), mais aussi terriblement prosaïques et crues. Aucune explication n’est ici fournie et il apparait vain et inutile de vouloir démêler le réel de l’imaginaire, mais le film désigne néanmoins Tom Ricks comme celui par qui ou à cause duquel tout arrive au cœur d’un environnement qui le (et nous) déstabilise, figuré par des lieux parisiens insolites. Juste déplorera-t-on que l’ensemble finisse par s’essouffler et donc tourner à vide, inapte à jouer sur la durée pourtant réduite (01h25) d’un mystère qui, au lieu de s’épaissir, tend à se diluer et s’évaporer. Comme l’attention du spectateur en somme.