"You're in love with a fantasy" "I'm in love with you"
Gil, fiancé à une ravissante américaine, vient passer quelques jours à Paris avec ses parents conservateurs et désagréables. Empêtré dans l’écriture d’un roman qu’il n’arrive pas à finir, il cherche désespérément l’inspiration alors que sa fiancée préfère passer journées et soirées avec un couple d’amis prétentieux et pompeux. Mais les douze coups de minuit vont lui permettre comme par magie de voyager dans ce qu’il considère comme l’âge d’or de Paris : les années 1920, remplies de personnages hauts en couleur comme Pablo Picasso ou Scott Fitzgerald.
Le principe est une merveilleuse idée de cinéma. En trimballant à travers le temps Owen Wilson, double plus jeune de lui-même, Woody Allen rend hommage à la ville lumière à sa façon : en plongeant dans la mémoire et en la peuplant des plus grands artistes qui y ont vécu. Cela pourrait être surfait, bouffi, c’est aérien, drôle et poétique. C’en est presque un miracle de voir comment le film passe d’une époque à l’autre avec une légèreté et un naturel confondant, dans des décors et des lumières absolument parfaits, au rythme d’une musique chaleureuse et jazzy. Et puis il y a cette galerie d’artistes où il n’est possible de connaître tout le monde que si on est très calé sur le sujet, mais ce n’est pas grave au fond. Car derrière le défilé de célébrités, c’est l’itinéraire d’un artiste d’aujourd’hui qui est tracé, ses questions et ses doutes. On regrette juste le passage trop furtif d’Adrian Brody qui vole presque le film en une seule séquence , et qui se révèle être un acteur de comédie accompli, même le temps d’un sketch.
Et si « l’autre » film qui se passe de nos jours peut paraître un peu fade en comparaison, c’est pourtant l’occasion pour Woody Allen de tourner en dérision avec sa légèreté habituelle les arrogants, les conservateurs, les rationnels, les sérieux… et rappeler que Paris est surtout là grâce à ses artistes.
L’ensemble porte vraiment la marque de Woody Allen, c’est bavard, ironique, léger, parfois drôle mais surtout plein de charme. Un cinéma qui ne se révèle pas instantanément, ce n’est pas un film puissant, qui frappe, qui marque. On peut parfois regretter la trop grande légèreté et le manque de force d’un script qui fait presque paresseusement tourner ses personnages, mais le charme est tellement fort qu’il n’est pas difficile de se laisser emporter. Les allergiques au cinéaste new-yorkais ne l’aimeront pas vraiment plus après son passage à Paris, les inconditionnels français seront charmés qu’il ait trouvé dans leur capitale un si bel écrin.
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