Easy Rider, curieux sujet de fascination de par le monde durant maintenant plus de 40 ans. Le film de Dennis Hopper, l’acteur, d’ordinaire, aura marqué les générations comme étant le film déclencheur d’une nouvelle vague hollywoodienne à la fin des années 60, un film contemplatif qui mettait en lumière le prix de la liberté dans une société assistée et jalouse de son prochain. La radicalité des cultures, l’affront d’une simple coupe de cheveux loin des chez soi, l’esprit de fuite en avant alors que la société dicte ses lois, ses mœurs. Dennis Hopper et son compagnon de route, Peter Fonda, accessoirement Jack Nicholson, sont des parasites dans un corps réglé comme du papier à musique, des mecs ayant préférer tenter leur chance sur la route, libre comme l’air, plutôt que comme maillon d’une infinie chaîne de consommation, de production et de stéréotypes.
Si l’on n’est maintenant coutumier du film dit d’époque, soit un retour en arrière pour le besoin d’une fiction, il est rare de pouvoir encore contempler un véritable film sur son époque propre. C’est le cas d’Easy Rider qui fait hautement figure de témoignage d’une époque pas si lointaine ou l’envie de libertés, d’émancipation, était plus forte que jamais. Des hippies vivant en des communautés arriérées, en quête d’oubli d’une vie en métropole stressante et futile, des agriculteurs d’Amérique profonde en quête de savoir, un peuple sudiste raciste et intolérant seront parmi d’autres, les spectateurs et les acteurs du voyage de nos deux californiens sur leurs motos Old School, partant chassé l’inconnu contre vent et marée.
S’il est difficile pour certain de s’imprégner du climat du film, qu’ils penseront futile et sans récit, il est d’autant plus facile pour d’autres, curieux, de comprendre les aboutissants, les intentions de Dennis Hopper qui aura, en réalisant ce film, simplement voulu dresser un portrait social, géographique et ethnographique de ce grand pays qu’est l’Amérique. Les cultures se heurtent plus que jamais, les paysages détonnent autour de longues routes monotones, le vrai vent de liberté des temps modernes, aux commandes d’un véhicule à moteur. Fait marquant, si nos deux compagnons sont deux purs produits ethniques américains, ils découvriront malgré eux que l’Amérique est bien plus vaste et complexe qu’il ne l’avait pensé. Leur voyage se terminera par ailleurs brutallement faute d’intolérance. La peur du différent, la jalousie engendre un acte cruel et difficilement compréhensible.
Les personnages de Hopper et Fonda étant intrigants, Easy Rider ne serait pourtant pas ce qu’il est sans l’apparition quasi spontanée de l’énorme Jack Nicholson. Oui, acteur déjà admirablement fou, un tournage sous l’emprise du cannabis aura sans doute révélé au monde l’un des tous meilleurs acteurs des temps modernes. Bref, un film d’une authenticité à l’épreuve des balles, un aspect qui aura sans doute laissé sur le carreau un public insatisfait n’étant pas venu pour philosopher. Le trip sous acide à la Nouvelle-Orléans est d’ailleurs une preuve de la complexité d’esprit de Dennis Hopper, qui n’explique rien mais qui laisse le public décortiquer ses intentions. Culte mais pas très accessible, ça, il faut le souligner. 16/20